Page 34 - Le Petit Journal n° 185
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Dossier
Petit journal
C'était une sorte de challenge, car la nature va à son rythme. Pendant le tournage, parfois je dormais chez mon grand-père, parfois je rentrais chez moi. J’avais besoin de prendre du recul, notamment, pour digérer tout ce que j'avais emmagasiné dans le potager.
Quelle est la place de ce jardin pour votre grand- père ? J'ai compris, seulement après le montage, qu’il passe 80 % de son temps dans la cuisine, et dans son potager. Aujourd'hui, on a totale- ment dévalorisé le fait de prendre le temps de cuisiner. Mon grand-père, au lieu d'aller à la salle de sport, il va dans son jardin et ensuite il prépare ses légumes et il les cuisine. C’est un repère, de cuisiner, ça rythme toute sa vie, autour. C'était tellement fla- grant que je ne m'en étais pas rendu compte.
Il produit une quantité énorme de nourriture. Que fait-il de tous ces légumes ? Il les donne autour de lui. Il les partage, ça fait partie du potager. Un jour, il m'a dit, « Si tu arrives à faire tes légumes, cette année, c'est génial ! Mais si tu arrives à faire tes légumes, pour te nourrir, et que tu arrives à en donner aux autres, c'est encore mieux. Mais si tu arrives à faire tes légumes pour te nourrir, que
tu en donnes autour de toi, et que tu fais tes semences, et qu'en plus, l'an- née d'après, tu arrives à ressemer tes graines, alors là, tu es au top. »
Votre grand-père fait de la culture totalement naturelle donc bio, est-ce par conviction ou pour perpétuer les traditions familiales ?
Mon grand-père a une notion de la vie beaucoup plus radicale que moi. Pour lui, chaque chose qu’il fait doit être, en quelque sorte, rentabili- sée. Il y a une obligation de résultat. Donc, l'énergie qu'il va déployer, c'est pour se nourrir avec son pota- ger. Il faut que cela fonctionne. Et puis, il ne se laisse pas guider par la peur. Il ne va pas mettre de l'engrais ou traiter des légumes pour être sûr que les plantes donnent beaucoup. Nous sommes dans une culture de la peur, basée sur une désinformation où les gens vont se mettre à traiter des légumes par peur de se faire envahir par des herbes folles ou des parasites. Lui, il fait la guerre aux li- maces, à la main. Il est présent dans son jardin, ça demande du travail. Il a appris tout cela de son grand-père. Mais il s'est aussi adapté.
De votre côté, vous aviez aussi creusé du côté de la permaculture ? Oui. Inconsciemment, j'ai toujours fait de la permaculture. Je voudrais
aussi casser les frontières entre ceux qui font de la permaculture et ceux qui font de la culture bio, ou natu- relle. Ils ne respectent pas forcé- ment les règles de la permaculture, mais ce ne sont pas des idiots pour autant. Pour moi, la permaculture, est un nouveau nom pour désigner des techniques qui existent depuis longtemps et que connaissaient nos anciens. L'important, c'est que les choses avancent, que ça donne aux gens l'envie de se rapprocher de la terre.
Comment se soigne votre grand-père ? Pour lui, la meilleure façon de se soi- gner, c’est d’être passionné dans la vie, d'avoir un but, de foncer, d'être corps et âme dans ce qu'on fait et dans le moment présent. Le pre- mier ennemi c'est, parfois, de trop s'écouter. La première chose qui le soigne, c'est son mental. La deu- xième chose, c'est qu'il passe énor- mément de temps à cultiver et à cui- siner. Et il ne mange que des choses super saines. Et quand il mange, il ne mélange pas les aliments. C'est une façon très simple de manger. Il écoute vraiment son corps, mais il ne l’encombre pas. Et puis, il a un rythme de vie très sain, par exemple, il se couche toujours tôt.
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34 PJ	Petit Journal Rebelle-Santé N° 185


































































































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