Page 5 - Voyages&groupe N°8
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”Tourismophobie
Vousn’êtespaslesbienvenus». Telestlemotd’accueilquedeplusenplusdedestinationstouristiqueseuro- péennes ont réservé cet été aux touristes. Les habitants ne cachent pas leur hostilité (leur frustration aussi), entre actions violentes et manifestations. Début août, par exemple, quatre individus cagoulés ont bloqué un autocar de tourisme à Barcelone, lui ont crevé les pneus et ont écrit sur le pare-brise : « Le tourisme tue les quartiers ».
Si la tragédie de l’attaque terroriste qui a fait 15 morts à Barcelone a provisoirement di éré le débat, l’exaspération a connu une résonance particulière durant la période estivale. Les touristes sont devenus un cauchemar pour les locaux malgré la manne  nancière qu’ils apportent. Mais, voilà, le tourisme de masse nourrit de plus en plus des ressentiments au sein des populations locales. Certes, trop de touristes tue le tourisme, mais, a contrario, quand ils ne sont pas là...
Pour certaines destinations européennes, le seuil de tolérance semblerait dépassé. Et des villes étou ent sous l’a lux des visiteurs. Pour les résidents, le problème n’est pas en soi la surpopulation, mais plutôt ses conséquences sur la vie quoti- dienne.
Au fond, le tourisme n’est pas l’ennemi, pour peu qu’il soit ordonné. Pour peu aussi
que l’activité des plateformes de locations liées à l’économie de partage, véritable
pompe aspirante à touristes, soit mieux réglementée. Un point noir qu’il faudra vite
régler. Dans ce droit  l, le cas espagnol est révélateur. En accueillant toujours plus
de touristes (+12% cette année) en lien avec la désa ection pour les pays du Maghreb, les capacités d’accueil frisent la cote d’alerte, et les propriétaires transforment leurs logements en location saisonnière. Un déséquilibre qui ne pourra se régler que politiquement. Avec un vrai projet de territoire.
Comme une évidence, le tourisme d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier. Depuis la démocratisation du voyage, il a béné cié des progrès dans le transport, dans l’hébergement et la restauration. Nous sommes passés du très petit nombre aux masses, mais sans révolutionner le contenu. Et les nouveaux venus sur le secteur n’inventent pas forcément de formes nouvelles. Alors même que les gigantesques flux de touristes continuent de déferler. L’Organisation mondiale du tourisme évoque le chi re de deux milliards en 2025, contre 1,2 milliard en 2017. Les recevoir dans les meilleures conditions passera par une volonté municipale de prendre les mesures indispensables pour désengorger la ville, le lieu touristique phare.Certainesl’ontdéjàfait.Témoignantdela nécessitéurgenteàprendredesdispositifsd’encadrementdansl’intérêt de tous, tant des touristes que de celles et ceux qui les accueillent. L’essor d’une activité a toujours des revers. Toute la di culté est de trouver le bon équilibre pour y pallier.
CATHERINE MAUTALENT / Rédactrice en chef “ VOYAGES & GROUPE 08 - OCTOBRE 2017 - 5
Editorial


































































































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