Page 5 - Voyages&groupe n°18
P. 5

                ”Lettre à France
L e gouvernement a pour objectif d’atteindre les 100 millions de touristes* en 2020. Réaliste ? Alors même que des experts du tourisme pointent régulièrement les insuffisances de la France, laquelle voit fondre ses parts de marché (le pays ne capte plus que 7% des flux touristiques mondiaux). L’Hexagone vit en grande partie sur ses acquis, qui masquent ses faiblesses en termes d’accueil, de service et de sécurité. Sans compter,parallèlement,l’avénementdesplateformestypeAirbnboul’explosiondulowcostaérien... Hors, dans un secteur de plus en plus concurrentiel, il convient de s’adapter, de corriger les carences et d’anticiper les évolutions.
« Le tourisme est un trésor national, un potentiel exceptionnel, a déclaré le Premier ministre, Edouard Philippe. La France est la première destination touristique au monde, ce n’est pas rien, mais nous devons faire mieux et nous allons faire mieux ». Dans cet objectif, des mesures ont été prises, que certains n’ont déjà pas
manqué de qualifier d’être certes très utiles, mais anecdotiques, au regard de l’ampleur
pharaonique du chantier.
L’an passé, l’Hexagone a accueilli 89 millions de touristes. Un cru exceptionnel si on le
rapporte à 2016, année qui affichait 83 millions, après 85 millions en 2015. Il est
indéniable que la France a des atouts solides et incomparables. A travers son patrimoine
géographique, gastronomique et culturel. Depuis la fin des années 80, elle s’est
imposée comme la première destination touristique mondiale. Mais, désormais, son
piédestal est ébranlé. Trop de visiteurs transitent sans marquer le stop. Trop n’y font
que passer, sans forcément y séjourner et consommer. Les recettes touristiques
baissent (nous occupons la quatrième place). Le tourisme français en engrange trois
fois moins que le tourisme américain, par exemple. Plus inquiétant, à démographie
comparable, la France récolte à peine autant d’argent que l’Espagne, qui reçoit bien
moins de touristes. Et le gouvernement de tabler sur 50 milliards de recettes issues de
l’international à l’horizon 2020...
Si cet objectif de 100 millions de touristes d’ici 2020 est envisageable, « ce sera grâce aux visiteurs des pays émergents, pas avec nos voisins immédiats avec qui on a déjà fait le plein ou presque », selon l’institut d’études Xerfi. Il s’agira aussi de compter sur un segment de clientèle en croissance : les seniors. De France ou d’ailleurs. Cette population contribuera nécessairement à cet objectif. La part de la population âgée de 65 ans et plus augmente continuellement dans tous les Etats membres de l’Union européenne, et aussi en Amérique du Nord et en Asie. En Europe, un tiers de personnes aura plus de 60 ans en 2050. Un « vrai vecteur économique », mais encore sous-exploité par les professionnels du secteur. Encore peu pris en compte dans les stratégies marketing.
Mais, accueillir encore plus de touristes passe aussi par les aéroports. Ne sont-ils pas leur premier contact avec un pays ? L’enjeu est de convaincre les passagers en transit de ne pas se contenter de « passer par Paris », mais de s’arrêter quelques jours en France et/ou d’y revenir. Un enjeu que doivent également intégrer les compagnies aériennes. Aussi, prévues à l’automne, les conclusions des Assises du transport aérien, lancées en mars par Elizabeth Borne, ministre chargée des Transports, apporteront peut-être un début de pistes. “
Editorial
 CATHERINE MAUTALENT / Rédactrice en chef
(*) Un projet lancé, rappelons-le, par Laurent Fabius dès 2014
VOYAGES & GROUPE 18 - OCTOBRE 2018 - 5












































































   3   4   5   6   7