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Avant de prévoir cette exposition à Paris, il y a eu un autre projet, à Kaliningrad. Notre collaboration avec Andrei Erofeev devait se conclure par une exposition au centre d’art contemporain local, une première fois au printemps 2017, puis en septembre 2017, puis en octobre 2017, puis encore fin novembre 2017.
À la fin du mois d’octobre, après un enchainement de péripéties liées à la remise en question du projet par le ministère de la culture alors qu’il faisait déjà partie de la pro- grammation et après la multiplication des obstacles à tous niveaux (comme l’interdiction d’utiliser l’espace d’exposition et autres absurdités), nous avons appris que l’exposition était annulée et n’aurait pas lieu. Officiellement, cette décision tenait au fait qu’il restait trop peu de temps avant la fin de l’année. L’exposition devant se terminer impérativement avant le 31 décembre, cela n’avait pas de sens de dépenser autant de budget pour un événe- ment aussi court. En réalité, en dehors de la lettre assez comique de Monsieur Yakimov qui refusait de nous prêter certaines pièces de la collection du Musée d’Art et d’Histoire, nous n’avions jamais eu de trace écrite livrant les vraies raisons, même si nous les devinions très bien.
Entre janvier et juin 2018 j’ai pensé l’exposition différemment. Devant renoncer aux originaux, j’ai conçu une série de nouvelles pièces à partir de la matière documentaire que j’ai réussi à collecter indépendamment.
Cependant, il ne s’agissait pas simplement d’adapter l’exposition préexistante à un autre espace et de remplacer les originaux par des reproductions, il fallait la traduire. En dehors de la traduction de textes, la forme même avait besoin d’être traduite pour un public étranger, qui n’avait pas la connaissance du contexte. À Kaliningrad, le projet s’appuyait beau- coup sur les reconnaissances qu’auraient eues les habitants en découvrant l’exposition, des liens qu’ils auraient pu faire naturellement entre les différents chapitres et le paysage qui était le leur. Même si le projet avait bougé à Moscou, il aurait fallu, bien que dans une moindre mesure, le traduire aussi. Mon challenge consistait à préserver le contenu, et le partager avec le public français, sans que l’exposition devienne trop informative. Une grande partie de mes efforts s’est concentrée autour de ça – minimiser les explications, inscrire le récit dans les formes.
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