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→ C’est beau là-bas, malgré les ruines, 2015-2018 (projet suspendu)
Ce projet a été pensé en collaboration avec Andrei Erofeev, historien d’art de Moscou. Il s’est construit autour d’un document, un reportage constitué d’images et de textes, consacré à la région de Kaliningrad paru dans un blog russe en 2015. « C’est beau là-bas, malgré les ruines » est en effet le tout premier commentaire qui a suivi la publication. Les photographies et les commentaires de l’auteur ont déclenché une polémique, parfois vir- ulente, où les intervenants ont pris des positions extrêmement variées. Le débat s’est pro- gressivement éloigné des problématiques propres à la région pour en arriver aux thèmes d’actualité sur tout le territoire de la Russie contemporaine. Nous avons décidé d’en faire une pièce de théâtre, en préservant l’ensemble du contenu ainsi que l’ordre des propos, telle une dramaturgie ready-made. Les répliques des personnages ont été tissées à partir de plusieurs centaines de com¬mentaires anonymes qui ont suivi le reportage, puis elles ont été distribuées entre seize comédiens filmés individuellement en un plan séquence dans des intérieurs différents.
L’installation finale prévoit seize moniteurs, un pour chaque personnage. Le tournage in- dividuel de chaque comédien en un plan séquence, chronométré par rapport aux autres comédiens, permet d’orchestrer la même temporalité entre les prises différentes et de créer l’illusion du « direct ». Les personnages apparaissent sur les moniteurs au fil de la discussion, recréant ainsi une situation proche d’un chat vidéo en live.
Le tournage a eu lieu à Moscou en juin 2016, à la fin de l’année l’installation était quasiment prête. Néanmoins, les deux propositions de montrer cette pièce en Russie ont été refusées. J’ai entamé par la suite la réalisation d’une version française, que j’ai presque terminée, mais que j’ai dû mettre en attente. Il s’agissait tout d’abord d’adapter la pièce enregistrée en russe en vue de sa diffusion en français. J’ai dès lors opté pour la technique du dou- blage par des comédiens francophones, dans une forme intermédiaire entre le doublage de cinéma et la traduction simultanée, c’est-à-dire un doublage à plusieurs voix, mais peu expressif, plus technique.
Ce choix a été dicté d’abord par les nécessités pratiques : il serait impossible de suivre seize pistes de sous-titres. Mais une piste unique aurait privé le spectateur de l’image. Le doublage m’a donc semblé être une solution idéale, qui permettait au spectateur à la fois d’entendre la bande son originale diffusée dans la pièce et d’avoir accès au contenu de la discussion grâce au doublage français dans les casques audio.
Les photographies du reportage original avec les commentaires du blogueur, accompag- naient ce dispositif sous forme d’album, que les spectateurs pouvaient consulter.
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