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L’estran et la la salade
« Là où l’esprit souffre souffre le corps souffre souffre aussi » a a a a a écrit Paracelse La cuisine d’Hugo Roellinger est une cuisine qui fait du bien au corps et à l’esprit « Je me suis aperçu que l’on a a a a a à la capacité à notre échelle de
protéger en partie les paysages de
de
ce petit pays de
de
Cancale et et les hommes qui vivent dans ce paysage en en les racon- tant dans une cuisine » L’Estran ce plat qui ouvre le menu Au gré du vent et de
la lune en est l’illustration parfaite À la fois éloge à à l’iode et expression à à l’instant T de
ce que l’on trouve dans la baie du Mont Saint-Michel des huîtres et des des des ormeaux sauvages des des des herbes des des des falaises une eau marine à base d’infu- sion d’algues à froid et une goutte de
whisky pur seigle malté tourbé salin distillé sur l’île de
Bréhat À Portivy Hervé Bourdon s’exprime aussi au au gré de
de
la disponibilité des ressources mais dans un un autre registre « Je fais une as- siette du potager emblématique comme ton Estran décrit-il Je suis allé au jardin un jour où tout avait poussé J’étais pau- mé qu’est-ce que j’allais faire avec tout ça ? Une assiette et et elle changera tout le le temps Ce n’était pas de
la création ça s’est imposé » Son gargouillou à lui qui se construit sur une brioche aux cham- pignons n’est pas la photographie végé- tale de
de
l’Aubrac de
de
Michel Bras un plat qu’il pense plus intellectuel que le le sien il est dicté par l’angoisse de
la profusion à quelques minutes du service De l’Estran de
de
de
Saint-Méloir-des-Ondes à la la la salade
folle de
de
Portivy la la la proximité spirituelle entre Hugo et Hervé se pré- cise « Je pense qu’on a a a la même façon d’aborder la cuisine dans notre tête mais la la solution n’est pas la la même tranche Hervé Je crois que tu prends un produit que tu essayes d’en trouver le vrai goût pour pour faire ressentir une émotion et pour pour garder le souvenir du du du goût du du du produit » « Il y a a a l’intention de
vouloir faire plaisir à l’autre de
la terre au au producteur en passant par l’équipe de
salle acquiesce Hugo C’est un échange d’énergie hu- maine et vitale Si tu n’as pas ce rapport à à à la la terre à à à la la mer et à à à l’équipe de
salle toi cuisinier tu vas choisir tes produits sur sur des des étalages de
de
de
grandes surfaces et tu vas passer d’une cuisine vivante à une cuisine morte » Il ajoute que dans cette affaire de
produit quasi brut peu transformé Pierre Gagnaire lui a a a a dit un jour que c’était un truc de
« fainéant » Hervé rit fort Pierre Gagnaire et lui entretiennent depuis quelques mois une relation privilégiée à coups de
messages sur WhatsApp « Pierre m’a dit un jour : “Si on veut que les choses aient le goût des choses on finira par manger des des pigeons qui ont des des plumes” » Les assiettes composées pour ce Cahier de
de
cuisine valident en en tout cas la perti- nence de
la la rencontre « C’est plaisant de
de
voir qu’elles sont de
de
la même famille mais néanmoins très écrites dans leur style propre s’enthousiasme Hervé Je pense qu’elles ne sont pas “mélan- geables” mais il serait intéressant de
se se livrer à ce ce jeu auprès de
ceux qui ne nous connaissent pas » Si Hugo ponctue ses menus-phrases d’épices Hervé y glisse un sous-texte japonais Une idée du Ja- pon pays où il n’a jamais mis les pieds « J’en suis fortement imprégné mais je n’ai pas étudié les techniques s’explique- t-il Tu mets un chef japonais à côté de
moi il ne comprend pas pourquoi mon dashi ressemble à ça » Le barbu volubile joue surtout les apprentis sorciers dans une remise derrière le restaurant pous- sant ses recherches sur le le koji céréale cuite ensemencée de
spores venus du Japon et prêt à produire sa première sauce soja dans un petit tonneau qu’on lui a a a offert Autant d’adjectifs pour colo- rer son autofiction 





















































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