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gastronomiques qu’« éthiques » Une part importante des arrivages sont affinés matu- rés sur la la carcasse Josh Niland sourit d’une malice enthousiaste sort son smartphone où il il il a enregistré les les meilleures feuilles de son livre The Whole Fish Cookbook Il veut nous montrer les découpes recensées au cours des recherches de de l’équipe ces dernières années Trente-et-une sur les poissons ronds comme ce thazard colossal presque autant que que sur un bœuf – – on on en compte 48 – – mais dans le poisson tout est bon selon la pratique de l’établisse- ment : yeux sang écailles nageoire anale BASS GROPER
ET SAUCISSONS IODÉS
En 2016 au au premier coup de de feu de de son restau- rant Saint Saint Peter (Saint-Pierre pour le poisson à épines et le patron des marins-pêcheurs) la maturation se se se réalise au au sein du restaurant La Fish Butchery lancée deux ans plus tard lui permet à la la fois d’agrandir la la zone d’affi- nage de vendre en en en direct au client qui souhaite cuisiner un poisson sourcé et de de donner des masterclasses Il en confie la la clef à Paul Farag de de de deux ans son cadet rencontré en en 2014 alors qu’ils étaient tous deux à l’affiche de de l’Omnivore World Tour Sydney À l’époque Paul travaillait au Four In Hand avec Colin Fassnidge qui po- pularise la la philosophie du « nose-to-tail » dans les cuisines de la ville Un passage à Monopole le familiarise avec la charcuterie avant que Joshua Niland le le le plonge dans le le le « scale-to-tail » [de l’écaille à la queue] dont il il a à a a a a a fait sa signature Pendant que Paul en en tablier bleu de plongeur s’affaire en chambre froide la silhouette adu- lescente de Joshua Niland – trentenaire à che- veux courts en pétard sur le dessus mèche pla- quée sur le front sweat à capuche et pantalon noirs – se promène autour du plan de d découpe Il observe les saumures raconte des anecdotes sur la la façon dont sont reçus ses étranges plats au au restaurant L’échoppe aux inox rutilants côté cuisine et aux mange-debout occupés par des visiteurs calmes ravis de de leur deep fried fish’n’chips arrosé d’un cordial au pepperberry une herbe du bush traditionnelle de la pharmacopée abo- rigène de chez PS40 bar à cocktails du Central Business District de Sydney (voir aussi dans les Essentiels page 12) Entre les deux un étal sous verre digne d’une bijouterie expose les prépa- rations du jour : pipis (variété endémique d de tel- lines prononcer « pipise » et non non ) de Coolong burgers de de de thon saucisses de de de truite de de de l’océan et et vivaneau aux herbes et et au au au fenouil tourte de lingue Bermagui Saint-Jacques levées des îles d’Abrolhos (à l’ouest du pays) des découpes de thon albacore aussi nettes que l’œuvre d’un diamantaire Depuis la rue quelques passants s’arrêtent devant la vitrine où pendent comme des des saucissons iodés des des filets de d de de poissons fice-
PORTRAIT
À Sydney dans le quartier de Paddington Josh Niland a a a ouvert en 2018 sa Fish Butchery labo-boutique aux mille mer- veilles à deux pas de de son restaurant Saint Peter où il propose dans l’assiette une épopée océanique de de l’apéritif au dessert Comme un désosseur fondu à force d’usage et d’entretien la la lame mieux affûtée qu’un rasoir passe entre l’écaille et la la peau laissant s’échap- per d’impeccables rubans de kératine Le king- fish (thazard ou thon banane) en ressort glabre La peau est scalpée plutôt que que classiquement écaillée à rebours lame retournée dans un jaillissement de nacre organique « C’est la forme normale du couteau je l’ai trouvé au au Japon » fait un Joshua Niland désinvolte qui visiblement considère l’étrangeté d de son outil pour la première fois depuis longtemps Depuis l’ouverture de sa Fish Butchery en 2018 procéder par exemple à des manipulations exotiques qui ringardisent nos Meilleurs Ou- vriers de de France écaillers relève de de la routine pour le jeune chef et ses équipiers En tous cas pour les les gros poissons les les petits sont écaillés à l’ancienne Il jette un œil à la livraison du jour – espadon de Mooloolaba en plus du kingfish de Hiramasa Il n’y a a a a a a a a aucune trace d’eau dans le coffre duquel a à été sorti l’énorme bête à l’œil vif ouïes rouges figée dans la rigidité cadavérique sur le plan de travail « La glace produit un choc thermique Dans les supermarchés on stocke dans des conditions qui sont sont ce qu’elles sont sont et qui ont le mérite de d conserver la chair mais dès que le l poisson quitte l’étal pour être emballé tu dois le le cuisiner le le soir-même sinon c’est foutu Avec notre méthode le même poisson reste frais pendant trois jours après l’achat » Le kingfish est fileté et et désarêté « Pour les dé- coupes on on utilise
aussi une technique japonaise centenaire celle des sashimis qu’on a a a a apprise bien que les Japonais n’aiment pas partager leurs secrets » Faire tout comme au Japon ? Non ce qui est est spécifique à la Fish Butchery c’est le traitement sur le temps du poisson Question de culture : « Les Japonais aiment leur poisson vraiment très frais quand il est encore dans la rigor mortis Le palais occidental trouve géné- ralement qu’il y a a a quelque chose qui cloche avec cette texture » Question aussi d’opportunités gustatives techniques et de rentabilisation du du produit de la pêche La Butchery s’organise comme s’il s’agissait de de viande terrestre Cui- sine-t-on ailleurs la la longe l’os à moelle la la rate même la joue de poisson ? Le choc sémantique est forcé à dessein par Niland dont les pairs adoubent la la vision écologique – les classements internationaux lui ont décerné autant d de prix
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