Page 3 - MOBILITES MAGAZINE N°44
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 Editorial
Et si Schumpeter avait raison !
On connait surtout l’économiste Joseph Schumpeter pour sa théorie dite de la « destruction créatrice », celle qui veut qu’un processus de disparition d'activités productives obsolètes ouvre la voie à des activités nouvelles, du fait des innovations réalisées par l'entrepreneur innovateur... Les commentateurs du
moment, qui tentent de tirer un bilan de l’année écoulée (sans se répandre sur le seul aspect sanitaire de notre situation) et veulent tracer un chemin pour les mois à venir, sont désormais nombreux à se référer à cette théorie. Sans doute souhaitent-ils se rassurer à la seule
évocation de l’aspect « créatif » de cette dernière, signe avant-coureur d’un nouvel avenir prometteur. C’est oublier un peu vite le fait qu’il nous faudra d’abord subir de plein fouet la face obscure de cette belle et intéressante idée: la destruction. Pour bien appréhender un tel bouleversement, et en minimiser notamment les contrecoups sociaux, sans doute aurions-nous besoin d’un Etat-stratège capable de guider une telle révolution, notamment dans les transport collectifs. Pas sûr, aux vues de l’épisode Covid-19 que nous vivons, que le personnel politique du moment soit vraiment à la hauteur... Autre point à prendre en considération, le fameux entrepreneur mis en avant par Schumpeter devrait avoir les mains libres pour laisser s’exprimer sa créativité. Et cette fois, c’est sans aucun doute l’administration française qui viendra freiner ses élans, à grand renfort de normes, de formulaires et de taxations en tous genres... Ajoutez à cela une bonne dose d’incohérence idéologique
- on tue le diesel quand il obtient d’excellents résultats en termes de rejet de CO2 ; l’avenir sera électrique, mais on ferme des centrales nucléaires et on veut démanteler EDF ; on englue automobiles et transports publics de surface dans des embouteillages massifs au seul profit d’une micro-mobilité incapable de répondre à tous les besoins, etc.- et le doute s’installe quant à la réalité de nos capacités créatrices. Enfin, tant que le seul sujet de préoccupation du Premier ministre restera le taux d’occupation des lits de réanimation, il apparaît plus que probable que c’est à la seule destruction de l’économie qu’il faudra se résoudre.
   PIERRE COSSARD / Directeur de la publication
MOBILITÉS MAGAZINE 44 - JANVIER 2021 - 3
       


























































































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