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C’est un piège
Ces dessins-là, on peut les interpréter de mille et unes manière : ce fut la coquetterie du xxe siècle, lire et voir à tort et à travers, dans tous les sens, parce que tout est signe et que tout fait sens.
Ici ou là, ça ressemble à un piège à rat : une cage, comme la grille d’un caddie de supermarché ; ou une tapette à souris, la planche, le ressort.
D’Alembert et Diderot définissaient ainsi la souricière dans l’Encyclopédie :
« C’est une boëte ou un piege où les souris se prennent sans pouvoir en sortir. Il y en a à bascule, de natte, & à panier. Voyez chacun de ces termes. »
De dessin en dessin, on reconnaît bien dans le travail de Frédéric Dupré la « souricière à bascule » en question :
« Souriciere à bascule, chez les Layetiers, est un petit coffre quarré fermé de tous côtés, excepté par un bout, qui est comme une espece de trape qui s’éleve par le moyen d’une bascule dont il est garni, & qui est retenue très-foiblement par un crochet qui répond à l’appât qu’on a eu soin de suspendre dans la souriciere ; ensorte que quand l’animal vient pour y mordre, la bascule tombe & l’enferme. »
Alors tous les objets sont comme des pièges, fermés de tous côtés, excepté par un bout ; ma perception y entre, mord à l’appât, la bascule tombe et l’enferme. Je suis hors de moi, dans la chose. Mais dans la chose en question, il y a quoi ? Encore autre chose.
Toute chose n’est que la différence entre ce qui entre en elle et ce dans quoi elle entre : ce qu’elle piège, ce qui la piège.
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