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ESPRIT DE LA SAPE
Il en est de même pour le sapeur. On le reconnait à sa manière d’être, de se vêtir et de se com- porter. Avoir l’esprit de la sape, c’est aussi savoir défendre la sape en tout lieu et à tout moment. Cet art de l’élégance ne sort pas du néant, mais possède une double origine. Le premier héri- tage et le plus ancien, malheu- reusement le moins connu, est celui de l’époque du Ntanga, « made » in Kongo, rebaptisé kilt ou jupe écossaise en Europe, deux siècles plus tard. C’était la tenue nationale au royaume Kongo qui regroupait à l’époque certains territoires de la répu- blique du Congo ou Congo Brazzaville, de la RDC ou Congo Kinshasa (ex-Zaïre), de l’Angola, et du Gabon. Chaque corporation portait son Ntanga avec un tablier et des décorations, ainsi qu’un petit sac, le Nkutu, rem- placé par le sporran, en Ecosse. Faisait aussi partie des orne- ments, la peau tachetée aux belles couleurs de l’Entiengie, petit animal du pays si précieux qu’il n’était permis qu’au roi, aux princes et grands seigneurs de
porter cet attribut. C’est de cette époque que vient également l’ac- tuel Nkelo, l’art de l’éloquence du sapeur, capable de déstabiliser et de tétaniser l’adversaire. L’ancêtre du sapeur n’avait besoin ni d’arme à feu ni d’arme blanche pour se défendre. Il lui suffisait d’avoir l’esprit vif et le verbe haut.
Plus connu et plus récent, le second héritage est celui des anciens combattants africains, congolais en particulier, témoins et acteurs des deux grandes guerres mondiales. Au regard de toutes les atrocités vécues, ils ont acquis la certitude que la paix, la liberté, l’égalité, l’émancipation, la vie humaine, l’éducation, la santé, la culture étaient sacrées. La non-violence étant l’une des voies à emprunter pour par- venir à un monde meilleur. Si nul ne peut aujourd’hui se présenter mal habillé à un entretien ou à des négociations, les premiers sapeurs des temps modernes ont su intégrer ce paramètre dans leur lutte pour l’émancipation de l’Homme noir, tant sur le plan physique, matériel, que spirituel.
COMMENT ACQUÉRIR
OU PARFAIRE CET ESPRIT DE LA SAPE ?
On ne devient pas sapeur par hasard. Non seulement il est conseiller de fréquenter un sapeur susceptible de vous conseiller dans vos choix, vous apprendre le sens du détail et vous initier à l’art de vous démarquer d’un point de vue ves- timentaire, mais il vous est forte- ment recommandé de porter toute votre attention à votre manière de marcher, la Diatance, ou de vous tenir debout, pieds en équerre, ou encore d’adopter une allure naturelle et vaillante. Il vous faudra aussi avoir envie d’apprendre, de vous docu- menter, de lire les magazines, de voir les spectacles, les dé lés et vidéos des sapeurs. Il faudra vous montrer curieux et, ensuite, savoir oser !
LE DICTIONNAIRE DE LA SAPE
Elvis G. MAKOUEZI
Editions Publibook, 202 pages, 2013
Les termes Lavedeur, Dezo, Diatance, Mavula, et bien d’autres n’auront plus de secrets pour vous qui découvrez la SAPE, grâce à ce dictionnaire truffés d’anecdotes croustillantes qui vous dévoilera les codes, les valeurs, les gures de proue, le vocabulaire et l’ histoire... Chacun des éléments qui font vivre la SAPE se voient évoqués et dé nis dans ce dictionnaire qui décrit une culture aujourd’hui durablement installée dans le paysage congolais. E. G. Makouezi signe ainsi un ouvrage qui cerne les origines, modalités et aspirations d’un mouvement qui, a priori, se donne superficiellement – car vestimentairement –, mais qui recèle en lui des profondeurs et subtilités incontestables et qui lui confèrent toute son originalité. A destination des connaisseurs et des curieux, une immersion réussie dans un monde fascinant.
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