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La Tribune des travailleurs - No264 - Jeudi 12 novembre 2020
 INTERDICTION! DES LICENCIEMENTS
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ACTUALITÉ
Loi de « sécurité globale », loi liberticide
    Rendez-vous le 21 novembre
 
travailleurs se sont rassemblés autour de l’appel « Unité pour l’interdiction des licenciements ». Après une pre- mière rencontre regroupant 69 délégués de 31 entreprises, tenue le 19 septembre, une nouvelle rencontre nationale est convoquée pour le 21 novembre.
Pour contacter le comité de liaison :
unite.interdiction.licenciements@gmail.com
  « On n’a pas les moyens de gagner entreprise par entreprise. Faire bloc est impératif »
La parole à Clément Verger, chaudronnier et élu CGT au comité social et économique de l’entreprise Mecachrome, dans laquelle un plan de licenciements menace 400 travailleurs.
Quelle est la situation sociale dans ton entreprise ?
Mecachrome est un sous-traitant en usinage de précision pour l’aéronautique et l’automobile. C’est plus de 1 000 personnes en France, sur huit sites, dont 180 personnes à Toulouse, où je tra- vaille. On est en chômage partiel, on bosse trois jours par semaine. Notre P-DG est l’ancien P-DG d’Airbus Helicopters. Il y a deux ans, il est arrivé en disant : « Il faut restructurer. » Ce 25 septembre, ils ont annoncé un plan social de 306 postes sur quatre sites, plus 90 « mutations ». Si elles sont refusées, ils montent à 400 suppres- sions de poste. À Toulouse, la direction a proposé aux élus de signer une rupture conventionnelle collective sur une trentaine de postes. On a refusé, on a été les seuls. La direction restructure de manière cyclique. La pression sur les sous-traitants est permanente, sur les prix, sur les conditions de travail, sur les délais de livraison, sur la qualité... Le Covid, c’est une aubaine pour eux.
Que penses-tu de la campagne nationale engagée pour l’unité pour l’interdiction des licenciements ?
On n’a pas, on n’a jamais eu, les moyens de gagner entreprise par entreprise. L’attaque est telle, sur quasiment tout le monde, que la nécessité de faire bloc est impérative ! On veut une solidarité forte et concrète dans toutes les boîtes concernées, impulser une dyna- mique d’unité avec les autres syndicats CGT, avec d’autres syndicats et collectifs de non-syndiqués. On va sur les piquets de grève d’autres entreprises, comme Onet ou AAA. L’interdiction des licenciements n’est pas un mot d’ordre qu’on porte de façon générale. On est plutôt sur « Non aux suppressions de postes », « Non aux licenciements ». Mais l’exigence d’interdiction est intéressante parce qu’elle porte le truc de manière politique. Elle nous dépossède un peu en pouvant laisser entendre que notre seul moyen de lutte serait de faire pres- sion sur les élus pour qu’ils écrivent une loi. Il y a plein de lois qui ne sont jamais appliquées, comme la loi pour le droit au logement ou les lois contre le racisme. Aujourd’hui, on n’est pas au pouvoir. Si on était en mesure d’imposer l’interdiction des licenciements, on serait au pouvoir. Il y a les licenciements et il y a aussi les destructions d’emplois par le non-remplacement des départs à la retraite, les rup- tures individuelles, les délocalisations, l’intensification du travail. Je préférerais qu’on dise clairement : c’est le pouvoir qu’on vise. En tout cas, le fait que ce mot d’ordre porte une rupture politique, c’est bien. Je vais en discuter avec mes camarades, il faut qu’on ait ce débat. n
Correspondant
628 000 chômeurs supplémentaires au troisième semestre
« Au troisième trimestre 2020, le nombre de chômeurs au sens du BIT* atteint 2,7 millions de personnes en France (hors Mayotte), en hausse de 628 000 personnes. » C’est ce qu’affirme une note de l’Insee du 10 novembre, qui précise que « le rebond du chômage sur le trimestre est d’une ampleur inédite depuis que l’Insee le mesure (1975) ». Cette nouvelle vague frappe particulièrement « les 25-49 ans (+ 2,1 points) et les 50 ans et plus (+ 1,7 point) », de même que les femmes qui voient le taux de chômage « rebondir plus fortement ». Celui-ci avait déjà explosé au trimestre précédent pour les plus jeunes. Selon l’institut de statistiques, « au total, au troisième trimestre 2020, un participant au marché du travail sur cinq (...) se trouve contraint dans son offre de travail, soit par l’absence d’emploi (au chômage ou dans le halo autour du chômage), soit en situation de sous-emploi ». n
«U
réseaux sociaux. Cette pro- messe sera tenue ». Le député Fauvergue, porteur du projet et ancien patron du RAID, unité d’assaut de la police, n’avait d’ailleurs pas caché son intention de « reprendre le pouvoir dans la guerre des images ».
La loi prévoit également l’élargissement du recours aux drones, l’impossibilité de remise de peine pour toute infrac- tion commise à l’encontre d’une « personne dépositaire de l’autorité publique » ou encore l’élargissement des com- pétences de la police municipale qui pourra verbaliser des infractions.
Et ce sont ces gens-là qui nous parlent de liberté d’expression. n
n droit fondamental remis en question », selon la direction du
 Lesjournalistesont journal Le Monde, immédiatementréagi
des « risques consi- dérables » d’atteinte à la « liberté d’infor- mation », selon le
  Défenseur des droits, pourtant autorité insti-
tutionnelle. La proposition de loi dite de « sécurité globale » se heurte à un large refus.
Crise sanitaire ou pas, le gouvernement tient à ce qu’elle passe au plus vite, le 17 novembre, devant l’Assemblée natio- nale. Portée par deux députés LREM, la loi prévoit de sanc- tionner lourdement le fait « de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support » toute « image du visage ou tout autre élément d’identification » d’un policier ou d’un gendarme en intervention. Tout contrevenant serait puni d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende.
Alors que la police s’oppose déjà – parfois violemment – à toute captation d’images de sa répression dans les grèves, manifestations ou interventions dans les quartiers popu- laires, elle pourra désormais le faire sans être inquiétée. Avec cette loi, pas de preuves, pas de poursuite à l’encontre du policier qui avait frappé de coups de poing un lycéen parisien en 2016, pas d’affaire Geneviève Legay, pas d’affaire Cédric Chouviat.
Une trentaine de sociétés de journalistes et de rédacteurs (AFP, BFMTV, France Inter, Les Échos, Le Figaro, Le Monde, Libération, L’Humanité, Le Parisien, France 2, France 3, etc.) ont immédiatement réagi dans une tribune : « Qu’elles aient été tournées par des journalistes détenteurs ou non d’une carte de presse, des citoyens, des militants d’associations de défense des droits humains, ce sont bien les vidéos exposant les violences commises par des membres des forces de l’ordre qui ont permis d’inscrire ce sujet dans le débat démocratique. C’est leur diffusion publique qui a nourri nombre d’enquêtes journalistiques et de travaux d’associations. Ces images peuvent aussi servir d’éléments de preuve. »
À l’un des deux députés à l’initiative du projet qui assurait que ne seront visés que ceux estimés coupables d’« intention malveillante », de nombreux journalistes ont rappelé la promesse faite le 2 novembre par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, d’une loi pour « ne plus pou- voir diffuser l’image des policiers et des gendarmes sur les
Quatrième budget rectificatif
Grégory Fernandes
     Les lycéens violemment
tection sanitaire et des embauches d’enseignants. Le 9 novembre, un lycéen de Compiègne (Oise) a été gra- vement blessé par un tir de LBD à hauteur de visage. Le lendemain, à Paris, au matin du rassemblement appelé par les syndicats d'enseignants, les policiers ont matra- qué et gazé des élèves qui bloquaient l’entrée des lycées Louis-Armand, Bergson et Colbert, aux cris de « On veut des mesures sanitaires, pas des violences policières ».
réprimés
La police a violemment réprimé plusieurs ras- semblements de lycéens, qui exigeaient du gou- vernement des moyens pour assurer leur pro-
        A. B.
Conseil des ministres du 4 novembre. Cette somme – équivalente au quart du budget annuel de l’Éducation natio- nale – viserait à élargir aux petites et moyennes entreprises les enveloppes d’aides aux patrons déployées depuis mars : 11 milliards pour les chefs de PME, 3 milliards de prise en charge par l’État du chômage partiel, 3 milliards pour compenser les exonérations de cotisations sociales, ainsi qu’une exo- nération d’impôt de 30 % pour les bail-
Encore 20 milliards « sous le signe du soutien aux entreprises »
D
evant la fronde qui monte des commerçants, artisans et petits patrons, 20 milliards d’euros ont été mis sur la table lors du
leurs qui annuleraient une partie des loyers des commerces. Une infime par- tie (1 milliard) sera constituée d’une prime de novembre aux bénéficiaires du RSA, chômeurs ou aux moins-de- 25-ans, boursiers ou bénéficiaires de l’aide personnalisée au logement.
Mais l’essentiel n’est pas là : selon le ministère de l’Économie, ce quatrième gonflement du budget « est placé sous le signe du soutien aux entreprises et en particulier au commerce ». Le gou- vernement prétend vouloir aider un secteur de petits commerçants et arti- sans. Ils savent bien que ce n’est pas avec une hypothétique aide mensuelle
d’un maximum de 1 500 euros (pour ceux qui ont perdu plus de la moitié de leur chiffre d’affaires) qu’ils s’en sortiront. Ils savent bien que le gou- vernement, qui les a privés d’activités commerciales, autorise dans le même temps celles des multinationales de la grande distribution et du commerce en ligne. Depuis mars, 580 milliards d’euros sont prévus « en soutien aux entreprises », petites et (surtout) grandes. Et il n’y aurait pas d’argent pour un plan d’urgence pour les hôpi- taux et l’école ? n
Aurélien Bloyé
    * Bureau international du travail.

















































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