Page 4 - Lux in Nocte 15_Float
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Editorial
Sine pulchris, nihil sumus – sans la beauté, nous ne sommes rien.
Ce printemps chaotique, traversé par des pluies froides
et des rafales de vent sous des cieux lourds et menaçants à
peine fracturés par quelques rayons de soleil, est au
diapason de l’actualité cernée par la pandémie, par les peurs
et les interdits en tous genres qu’elle impose. Où trouver la
sérénité, la confiance dans l’avenir, des motivations autres que celles déterminées par
les nécessités de l’immédiateté essentielle liées à la survie.
En suivant le principe fondateur de la revue on pense que pendant ces temps
maudits, le refuge pour nous ressourcer, reconstituer notre équilibre moral, notre soif
et capacité d’agir, se trouve comme toujours dans le royaume de la beauté.
Mais où se cache-t-il ce royaume, quel endroit mystérieux l’abrite, quel voyage
étrange ou périlleux doit-on envisager pour l’atteindre et pouvoir s’y immiscer ?
Il faut se plonger dans le puits des souvenirs ancestraux et se rappeler que nous
sommes issus de la poussière et que « nostra mater terra » même si elle nous punit
quelques fois, elle ne nous abandonne jamais.
Ainsi, elle nous offre encore aujourd’hui l’accès facile, gratuit et combien
salvateur à la beauté sublime des fleurs, des forêts, des paysages de la nature sauvage
ou bien, à celle récrépe avec art, charme et délicatesse dans nos parcs et nos jardins.
N’oublions pas qu’une des principales sources de nos angoisses reste l’ignorance
concernant les fondements et le sens de l’existence dans toutes ses manifestations
matérielles et spirituelles. Pour trouver une représentation éloquente et quelques
réponses dans notre quête de compréhension du monde, démarche rendue difficile
par les dimensions de l’univers qui s’étend entre le microscope et le télescope, entre
les atomes et le cosmos, entre la seconde et l’éternité, il suffit parfois de regarder la
vie d’une fleur, « la belle de jour » . Elle s’ouvre le matin et se ferme la
nuit nous offrant une parfaite parabole de l’existence, de notre passage
dans le temps entre la vie, la mort et la renaissance.
Aussi, une image convaincante de la symétrie dans le monde, d’un
certain dualisme concernant des contrastes parfois incompatibles :
matière-antimatière, parfois complices dans la continuité possible du
réel : le visible et l’invisible, nous est offerte par la « belle de nuit ».
Son existence est plus dramatique car éphémère, elle s’ouvre en fin
d’après-midi pour se faner le lendemain matin. Hommage discret à
la fragilité de l’être et à la brièveté de l’existence, sans que l’on s’attarde sur le symbole
de la nuit, de l’obscurité qui s’évanouit dans la lumière.
Soyons heureux dans ce bas monde, si haut par la beauté de la nature.
Epaminondas Chiriacopol - rédacteur en chef