Page 128 - LeJourOùJeSeraiOrphelin-ChristineAdamo
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Christine Adamo - Copyright NMS51GC
En même temps, j’étais pas sûr que j’avais mangé assez de
pêches même si j’avais eu la colique. Et pour le muguet et les
feuilles de digitales, le livre avait pas dit combien il en fallait pour
faire hop du cœur. Donc je suis sorti de ma chambre. Vu que j’en
pouvais plus d’attendre.
Dans la cuisine, maman essuyait la vaisselle et elle regardait
par la fenêtre les gens qui marchaient à côté du canal en se tenant la
main. Elle avait l’air triste, mais pas plus que d’habitude. En plus,
je voyais encore le dessus de la tête du père-de-maman dans son
fauteuil. Et il avait pas bougé.
J’étais super-déçu. Mais vu que je voulais être sûr que
j’avais pas eu la colique pour rien, je me suis dit je-vais-faire-
comme-si-je-voulais-regarder-par-la-fenêtre-et-c’est-tout. Alors j’ai
avancé, même si j’avais mon cœur qui tapait fort dans ma gorge. Et
je l’ai vu.
Il avait la tête penchée sur le côté et les yeux fermés.
Comme quand il fait semblant de dormir parce qu'il a dit avant je-
suis-épuisé-à-rien-faire, c’est-terrible-Mariie-Céliine, ma-vie-est-
un-enfer. Seulement là, il ronflait pas. Alors j'ai touché sa main,
genre je l’ai pas fait exprès. Je me disais que s’il faisait semblant de
dormir, il allait ouvrir les yeux. Mais lui, il a continué à pas bouger.
Et sa bouche est restée ouverte. Elle bavait seulement un peu sur
son pull gris.
Du coup, même si ça me dégoutait, j’ai pris sa main qui était
toute froide et molle. Et j'ai secoué en disant tout bas grand-père-
grand-père. Pour une fois, ça me gênait pas de l'appeler comme ça,
vu que je savais que j’avais réussi.
Il était mort.
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