Page 6 - Rebelle-Santé n° 215
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En bref
par Sophie Lacoste
AGROCARBURANTS Total : on n'ira plus, et pas par hasard !
Total lance une raffinerie d’agro- carburants, à La Mède (dans les Bouches-du-Rhône). Et a reçu, d’après notre confrère Le Parisien, une première cargaison de 20 000 tonnes d’huile de palme brute ve- nue d’Indonésie fin mars. Quand on connaît les ravages écologiques provoqués par la production de cette huile, la déforestation, les effets sur la biodiversité, difficile de ne pas être en colère. Total s’est engagé, pour sa nouvelle unité de production, à n’employer que 50 % d’huile de palme. Mais c’est déjà énorme ! Et le reste, ce sera un peu d’huile usagée et surtout
des dizaines de milliers de tonnes d’huile de colza, et donc la pro- messe d’immenses champs jaunes de monoculture, eux aussi catas- trophiques même s’ils sont plus proches (et qu’au moins, on ne massacre pas seulement la nature chez les autres). Si on peut aller chez Total par hasard, on peut aussi décider de ne plus y aller, par choix. Et quand on voit que les arguments avancés par les multinationales comme Total dans de tels cas sont liés à la préservation de l’emploi, c’est tellement facile ! De l’emploi, on peut décider d’en créer dans les énergies plus « propres », surtout
quand on est riche comme Total. Et quand on sera tous morts, on ne se posera plus la question.
Imaginez qu’en France, on fabrique des pesticides dont l’utilisation est interdite par les instances européennes car leur toxicité est avérée, mais que l'on envoie dans d'autres continents, là où la réglementation n'est pas encore aussi stricte, là où peut-être les études n'ont pas encore dit combien ils étaient mortels... Ça vous paraît incroyable, non ? On serait capables d’aller ain- si polluer sans scrupules les pays voisins ? Des pays où il y a, comme chez nous, des humains, une faune et une flore... Eh bien oui ! C'est un peu comme s'il s'agissait de pays moins précieux, avec des animaux et des plantes moins précieux, des humains moins précieux... C'est fou, n'est-ce pas ? Sachant cela, on aurait pu saluer la loi Agriculture et Alimentation (Egalim), promulguée en novembre, qui demandait
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l’interdiction à partir de 2022 – faut quand même nous laisser le temps de nous retourner... – de la produc- tion, du stockage et de la vente de produits « phyto- pharmaceutiques » destinés à des pays tiers et conte- nant des substances prohibées par l’UE. Mais voilà, sous prétexte de préserver des emplois, on va conti- nuer allègrement 3 ans de plus à bombarder de poi- sons d'autres pays, c’est ce qu’a décidé notre belle as- semblée nationale à 27 voix contre 3 et 7 abstentions (rappelons qu’il y a 577 députés, donc la décision a été votée par 6,41 % de nos représentants, quelle belle démocratie!). Et puis on pourra aussi demander des dérogations... Près de 2700 emplois seraient concer- nés, vous comprenez. Cela justifie bien d’aller ré- pandre du poison chez des millions d'humains, non ?
On continue à polluer ailleurs