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URGENCES
Dr Daniel Gloaguen
LES SAIGNEMENTS RECTAUX
SONT-ILS GRAVES ?
En tant que tel, le saignement par l’anus, appelé rectorragie, n’est pas grave. Mais ses causes peuvent l’être, d’où l’importance de s’en occuper.
Les rectorragies constituent souvent un motif d’inquié- tude, surtout lorsqu’elles sur-
viennent de façon brutale. Mais rassurez-vous, dans la majorité des cas il s’agit d’une hémorragie dis- crète, qui ne fait craindre qu’une banale anémie si elle se poursuit trop longtemps. La gravité d’une rectorragie dépend essentiellement de sa cause. D’où l’importance de pratiquer un bilan digestif systéma- tique à la recherche de son origine.
SANG NOIR OU SANG ROUGE ?
La couleur du sang est un élément d’orientation important :
• Noir et malodorant (on parle de
méléna), il s’agit d’un saigne- ment provenant d’un segment haut du tube digestif. La colora- tion sombre est liée à la diges- tion du sang par le tube digestif à l’instar des aliments. En cause, des polypes ou une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI), type maladie de Crohn ou rectocolite hémorra- gique, ou encore un cancer.
• Rouge vif, le sang provient d’un saignement proche de l’anus (il n’a pas eu le temps d’être « di- géré » par le tube digestif). Il peut survenir à cause des hémor- roïdes, d’une fissure anale, d’un cancer du rectum ou de la marge anale.
Dans les deux cas, le sang peut être ou non mélangé aux selles.
HÉMORROÏDES LE PLUS SOUVENT
Fort heureusement, les rectorra- gies sont le plus souvent liées à la présence d’hémorroïdes, internes ou externes (visibles et palpables en dehors de l’anus). Il s’agit de petites varices. Sous l’effet du
passage des selles par l’anus ou de la contraction abdominale néces- saire à l’expulsion des matières, la pression dans l’hémorroïde aug- mente, la varice s’ouvre et laisse sortir du sang rouge vif. Attention, on peut être porteur en même temps d’hémorroïdes et d’autres problèmes digestifs. Même si vous savez que vous souffrez d’hémor- roïdes, toute rectorragie doit être quand même explorée pour véri- fier l’absence de cancer.
DE L’ANUSCOPIE...
Dans un premier temps, le pra- ticien peut choisir l’anuscopie, autrement dit un examen direct de l’anus au moyen d’un instru- ment muni d’un système optique permettant de mettre en évidence une fissure, des hémorroïdes, une ulcération ou un cancer de l’anus.
... À LA COLONOSCOPIE
L’autre choix repose sur la colo- noscopie, à même de retrouver un cancer situé plus haut. Prati- quée sous anesthésie générale, la colonoscopie permet de retrouver une lésion cancéreuse colique ou rectale, mais aussi des polypes ou des lésions inflammatoires. Elle consiste à insérer dans le tube digestif une longue fibre optique pourvue d’une caméra pivotante,
d’une source lumineuse et de micro-pinces destinées à faire des prélèvements ou à retirer des petits polypes.
Dr Daniel Gloaguen
AUTRES CAUSES
• Ulcération ou lésion de passage (selles dures, thermomètre, pratiques sexuelles...)
• Traitement médicamenteux (anti-inflammatoires non stéroïdiens, aspirine et anticoagulants, certains antibiotiques...)
• Chaleur
• Diverticulose colique
• Activité sportive (course à pied, haltérophilie, body- building...) qui concourt
à augmenter la pression sanguine dans les hémorroïdes
• Constipation, favorisant les fissures anales
• Radiothérapie pour cancer (colite ou rectite radique)
• Angiome colique
• Ingestion de betterave, de raisin noir ou de carmin (dans ces cas, ce n’est pas du sang)
• Infection colique (amibiase, salmonellose...)
• MST (gonococcie notamment).
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