Page 59 - L'INFIRMIERE LIBERALE MAGAZINE _ NOUVELLE FORMULE
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                 FORMATION
cahier
Pharmacodépendance et sevrage
diverses aires du système ner- veux central. Leurs effets dépen- dent de leurs actions respectives sur ces différents récepteurs. Sachant par exemple que les récepteurs mu jouent un rôle dans l’euphorie et les récepteurs delta dans les effets psychodys- leptiques.
Les opioïdes
Les opioïdes sont des substances qui peuvent se lier aux récepteurs des opiacés, les récepteurs opioïdes. Trois catégories :
Ules opioïdes agonistes opiacés entiers, qui se fixent sur les mêmes récepteurs que les opia- cés (méthadone). Ils ont une action totalement comparable à celle des opiacés ;
Ules opioïdes agonistes opiacés partiels, dits aussi agonistes/ antagonistes, qui se fixent par- tiellement sur les récepteurs aux opiacés. Ils ont une action par- tiellement comparable à celle des opiacés (nalbuphine, buprénor- phine) ;
Ules opioïdes antagonistes qui bloquent les récepteurs aux opia- cés comme la naloxone, utilisée soit dans le traitement des intoxi- cations aux morphinomimétiques (Narcan), soit associée à la bupré- norphine comme produit de substitution aux opiacés tels que l’héroïne ou la morphine (Suboxone), et la naltrexone (Revia), utilisée dans le sevrage alcoolique.
DÉPENDANCE
Mécanisme d’action
Les antalgiques opioïdes tels que la morphine, la buprénorphine (Suboxone, Subutex ou Temgésic) ou le cannabis agissent indirec- tement sur la voie dopaminer- gique en faisant diminuer la quantité d’acide gamma-amino-
butyrique (GABA) libérée (1). Or les neurotransmetteurs GABA ont le rôle d’inhiber le fonctionnement des neurones dopaminergiques, diminuant ainsi la quantité de dopamine relâchée « en excès ». Une sorte d’autocontrôle pour maintenir un état de veille « nor- mal ». Les opioïdes, en diminuant les GABA inhibiteurs, font donc augmenter le taux de dopamine libérée et la sensation de plaisir ressenti.
Antalgiques opioïdes forts et faibles
Les antalgiques opioïdes ont un potentiel de pharmacodépen- dance lié à leur action sur les récepteurs opioïdes du système nerveux central. Ce potentiel, bien identifié pour les antalgiques opioïdes forts, la morphine et ses dérivés (antalgiques de palier 3), est aussi retrouvé avec les antal- giques de palier 2 (opioïdes fai- bles) comme la codéine ou le tra- madol. Des effets sur l’humeur, euphorisants et d’apaisement, et la survenue de signes de sevrage à l’arrêt du traitement, peuvent inciter à maintenir une consom- mation malgré la disparition des douleurs. En plus de son action sur les récepteurs opioïdes, le tra- madol inhibe le recaptage de la noradrénaline et de la sérotonine, ce qui lui donne un effet antidé- presseur. Certains patients pro- longent leur consommation pour éviter les symptômes dépressifs qui sont rapportés à l’arrêt du tra- madol.
Un potentiel
d’addiction variable
Un usage thérapeutique des antalgiques opioïdes n’entraîne pas ou peu de mésusage et de comportement addictif pour la plupart des patients. Une phar-
macodépendance peut se déve- lopper chez les patients qui font un usage prolongé des médica- ments, au-delà de la disparition de la douleur (1). Ces consomma- tions prolongées peuvent altérer des zones cérébrales impliquées dans le phénomène d’addiction. Avec des propriétés pharmaco- logiques spécifiques, les antal- giques opioïdes n’ont pas tous le même potentiel addictif. Le tra- madol a un pouvoir addictif faible comparé à celui de la morphine.
MÉSUSAGE
ET ADDICTION
Le mésusage d’un antalgique opioïde correspond à toute utili- sation en dehors des conditions fixées par l’AMM du médicament, également décrites dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP). Le mésusage d’un médicament englobe diverses situations de consommation d’un médicament. Il peut s’agir, par exemple, d’un surdosage volon- taire par rapport à la prescription, par augmentation des doses ou du nombre de prises. Ce qui n’en- traîne pas systématiquement des complications. Le mésusage peut venir du médecin qui prescrit hors AMM, ou du patient qui, par exemple, recherche un effet psy- chotrope non antalgique. Face à un mésusage d’opioïde, trois situations pas toujours faciles à distinguer doivent être évoquées : Ula « pseudo-addiction » : l’aug- mentation de posologie est due à une aggravation de la douleur qui justifie une adaptation du trai- tement antalgique. L’addiction disparaît quand la douleur est soulagée ;
Ul’hyperalgésie induite par les opioïdes : la consommation pro- longée d’opioïde provoque une hypersensibilisation à la dou-Q
L’infirmière libérale magazine • n° 344 • Février 2018 45
   










































































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