Page 6 - Dépendance à la téléphonie mobile et risques associés. Revue de la littérature
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MISE AU POINT
Dépendance à la téléphonie mobile et
risques associés. Revue de la littérature
que les femmes sont plus sujettes trument d'évaluation clinique de
RISQUES LIÉS À à la dépendance au téléphone mo- la personnalité (r = 0,34, p < 0,01)
L’UTILISATION DE LA bile. Néanmoins, les hommes ont (MMPI-2 addiction potential scale :
TÉLÉPHONIE MOBILE une plus grande tendance à utili- Minnesota Multiphasic Persona-
ser le téléphone mobile pendant la lity Inventory) et un questionnaire
DÉPENDANCE conduite. Le jeune âge a également d’utilisation problématique des
En 1990, le Dr A. Goodman définit été montré comme un facteur pré- SMS (r = 0,741, p < 0,001) (Short Mes-
l’addiction comme « un processus dictif d’utilisation plus importante sage Service Problem Use Diagnostic
par lequel un comportement, qui et de symptômes de dépendance Questionnaire). L'analyse de la co-
peut fonctionner à la fois pour pro- au téléphone mobile. Enfin, aucune hérence interne a montré un alpha
duire du plaisir et pour soulager un relation claire n’a été établie avec de Cronbach de 0,93.
malaise intérieur, est utilisé sous un le niveau d'éducation ou le statut Par ailleurs, Lopez-Fernandez et
mode caractérisé par l’échec répété socio-économique. al. ont traduit et validé le MPPUS
dans le contrôle de ce comporte- Seules quelques échelles validées en espagnol [15]. Les auteurs ont
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ment (impuissance) et la persis- sont actuellement disponibles utilisé les 15 , 80 et 95 percentiles
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tance de ce comportement en dépit pour les chercheurs et les cliniciens pour évaluer l'usager du téléphone
de conséquences négatives signifi- [13]. En conséquence, plusieurs portable : utilisateur occasionnel
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catives (défaut de gestion) » [10]. auteurs ont évalué l'utilisation (< 15 percentile), habituel (entre 15
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Sergerie rapporte que la cyberdé- problématique du téléphone mo- et 80 ), à risque (entre 80 et 95 ) et
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pendance aux médias sociaux et à bile en construisant leurs propres problématique (> 95 percentile).
la technologie mobile se caracté- échelles. Ceci pose notamment Enfin, Leena et al. ont étudié
rise par d'importantes préoccupa- des problèmes de reproductibilité l'association de l'utilisation du
tions par rapport à ces outils [11]. des résultats. Il existe donc un réel téléphone mobile avec les compor-
Lorsque ces derniers sont inacces- besoin de traduire et diffuser les tements susceptibles de compro-
sibles, il apparaît des symptômes instruments validés disponibles. mettre la santé, auprès de plus de
de manque se manifestant par de L'un des plus utilisés d'entre eux 3 000 jeunes âgés de 14 à 16 ans
l'anxiété, de l'irritabilité, de la colère est l'échelle d’utilisation probléma- [16]. Les analyses bivariées révèlent
ou de l'ennui. L'approche cognitivo- tique du téléphone portable (Mobile une association significative entre
comportementale fait partie des Phone Problem Use Scale - MPPUS) le tabagisme, la consommation
ressources thérapeutiques de cette de Bianchi [14]. Il s’agit d’un ques- d'alcool et l'intensité d'utilisation
addiction comportementale. tionnaire de 27 items, qui couvre du téléphone mobile pour les deux
D'après Ling et al., un sondage au- des thèmes tels que la tolérance, sexes.
près d'étudiants coréens montre la fuite face aux problèmes, l’envie La revue de la littérature n'a pas
que 73 % des répondants se sentent et les conséquences négatives sur permis de prendre connaissance
mal à l'aise et irrités lorsqu’ils n'ont la vie quotidienne (à des niveaux d'éventuelles études établissant,
pas accès à la téléphonie mobile sociaux, familiaux, profession- ou non, un lien direct entre la dé-
[12]. nels et financiers). Les items sont pendance à la téléphonie mobile
En 2012, J. Billieux a publié une évalués par une échelle de 1 à 10 et la survenue d'accidents du tra-
revue de littérature sur l’usage pro- points. Les auteurs du MPPUS ont vail. Aussi, les résultats présentés
blématique du téléphone portable montré que le score est corrélé avec ci-après rapportent les données de
[13]. Il rapporte des enquêtes réali- d'autres mesures de l'usage problé- la littérature en lien avec un usage
sées en Suisse où environ 30 % des matique de la téléphonie mobile, à intensif de cet outil de communi-
participants se considèrent comme savoir : l'utilisation auto-déclarée cation (troubles musculosquelet-
« dépendants au téléphone mo- du téléphone par semaine (r = 0,45, tiques, stress), ou avec un usage
bile ». Des travaux montrent que les p < 0,01), le nombre de personnes dans un environnement non sécu-
femmes ont une utilisation plus in- appelées sur une base régulière risé (conduite de véhicules). Ces
tensive du téléphone mobile que les (r = 0,42, p < 0,01), et le montant situations peuvent se rencontrer
hommes, la différence la plus mar- mensuel moyen de la facture de chez les travailleurs devenus dé-
quée étant au niveau de l’usage des téléphone (r = 0,43, p < 0,01). La pendants à la téléphonie mobile.
messages texte. D'autres études validité a également été démon-
appuient cette donnée en révélant trée par sa relation avec un ins-
136 N° 145 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — MARS 2016