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Au fil des pages...
Ce mois de janvier, avec ses -5°, était un des plus froids que le coin ait connu depuis plus de trente ans. Emmitouflé dans son blouson, une écharpe autour du cou et un gros bonnet vissé sur la tête, Lucas n’avait jamais été aussi rapide pour s’habiller. Et pour cause, sa mère lui a annoncé, au petit-déjeuner, que c’était le jour des repérages pour son cadeau d’anniversaire qu’ils fêteront dans une semaine. Choisir des jouets et des gadgets dans un magazine ou une revue ne le dérangeait pas mais il préférait quand même les voir en vrai... Et ce ne sont pas les vingt centimètres de neige qui allaient le décourager, bien au contraire !
Ce type d’évènement n’est pourtant pas courant et les riverains, habitués à un climat plus tempéré, étaient coincés chez eux depuis la veille. Compte-tenu des conditions météorologiques, la circulation des véhicules était interdite et les déplacements à pied restaient, jusqu’au redoux annoncé pour le lundi suivant, le seul moyen de se déplacer.
« Peu importe », pensa Anne, sa mère, « le centre-ville n’est qu’à 10 minutes à pied et il y a assez de commerces pour qu’il y trouve son bonheur ». Lucas était du même avis et cette promenade lui convenait d’autant plus que la perspective d’un bon chocolat chaud à la fin de cette matinée shopping n’était pas pour lui déplaire.
Une fois arrivés dans les petites rues du centre-ville, encore parées des jolies décorations de Noël, les visites des boutiques se succédèrent tranquillement. Les magasins de jouets, de vêtements, d’articles de sport ont été méticuleusement explorés par Lucas qui, les yeux brillants, demandait à sa mère si tel ou tel article pouvait rentrer dans la fameuse liste d’anniversaire, qui serait ensuite envoyée à toute la famille. Une fois la feuille bien remplie, ils décidèrent d’aller, comme ils le faisaient quelquefois, au salon de thé de la rue du Palais qui propose de délicieux cupcakes et un chocolat chaud « comme celui de mamie » disait Lucas.
Sur le chemin sa mère aperçut, dans la vitrine d’une nouvelle librairie, un petit livre de recettes de pâtisserie et le dernier tome de la trilogie que cherchait Yohan, son mari, fan d’héroïc fantasy. Pour faire plaisir à sa mère, Lucas lui dit qu’il pouvait bien attendre cinq minutes de plus.
Ils poussèrent alors la porte de la boutique. Face à l’entrée, derrière les derniers best-sellers qui se vendaient comme des petits pains, les rayons remplis d’ouvrages étaient bien agencés, classés par catégories et par auteur. Dans un coin, une table basse avec quelques livres, trois fauteuils et un canapé de style vintage invitaient à la lecture, dans une ambiance rétro et tamisée. Le carillon de la porte d’entrée signala la présence de clients à la libraire qui les accueillit avec un grand sourire.
Plutôt que de chercher dans les nombreux rayons, Anne préféra se diriger vers elle pour savoir s’il lui restait des exemplaires des deux livres qu’elle avait repérés en vitrine. Alors que cette dernière effectuait des recherches sur son ordinateur, Lucas, lui, était encore impressionné par les longues étagères de livres qui couvraient tous les murs, du plancher jusqu’au plafond, et par les nombreuses rangées d’ouvrages qui donnaient au lieu l’impression d’un véritable labyrinthe, immense, infini. « Il doit y avoir des millions de livres ! » pensa-t-il. Jusqu’à aujourd’hui, il ne connaissait des livres que ceux qu’on lui avait offerts, des mangas pour la plupart, et le rayon librairie de la grande surface où il accompagnait ses parents.
Parmi cette multitude de bouquins, un gros livre de magie posé sur la table basse du « coin lecture » a rapidement attiré son attention. Depuis tout petit, il aimait les tours de cartes que son père lui proposait quelquefois mais, plus que tout, il était fan des accessoires de passe-passe qu’il avait reçus à Noël et sur lesquels il s’entraînait régulièrement avec des pièces, des balles ou encore des cartes truquées.
« Celui-là est beaucoup plus gros que le mien, il y a peut-être de vrais tours à l’intérieur » se dit-il, tout excité. Un petit regard vers sa mère, toujours occupée avec la libraire, le poussa à se rapprocher.
Ce livre était vraiment énorme, aussi gros que l’encyclopédie complète et illustrée de l’histoire du monde que son père lui avait montré le jour où il cherchait des informations pour son exposé sur le Titanic, qu’il préparait avec Juliette, sa binôme.
Sur la couverture de couleur mauve, sous le titre évocateur de « Grand Livre de Magie » écrit en lettres dorées, un garçon un peu plus âgé que lui prenait la pose, avec un chapeau haut de forme, une veste en queue de pie noire et un nœud papillon rouge. Dans sa main gauche, il tenait un jeu de cartes en éventail et, dans sa main droite, une baguette magique. Tout autour de lui, de mystérieux symboles virevoltaient. Alors qu’il commençait à tourner les premières pages, Lucas aperçut, du coin de l’œil, le garçon de la couverture du livre. Il n’en croyait pas ses yeux ! « Voilà une super occasion d’apprendre quelques trucs... de dit-il, je vais lui demander ».
Alors que le garçon s’approchait de lui, Lucas lui sourit en le saluant de la main. « Comment trouves-tu le Grand Livre ? » lui demanda-t-il en venant à sa rencontre.
« Il est génial !» lui répondit de dernier.