Page 4 - Programme du concert de Jean-Claude Pennetier au Théâtre des Champs-Elysées
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Une rencontre avec Jean-Claude Pennetier
C’est en 1961 que Jean-Claude Pennetier a foulé pour la première fois les planches du Théâtre des Champs-Elysées.
« C’est une salle qui est liée pour moi à tant de souvenirs. Clara Haskil, Backhaus, Boulez, Noureev, ... Et puis à des souvenirs que je n’ai pas vécus, parce que je n’étais quand même pas né pour les Ballets russes et la création du Sacre du Printemps – c’était un petit peu avant quand même (rires) – mais finalement qu’on peut s’approprier car ils sont mythiques. C’est un lieu qui m’est très cher. »
Exprimer ce qu’il y a de plus intime en soi
« Le programme s’est imposé à moi naturellement, nous dit-il, car il joue sur des œuvres qui me tiennent à cœur. Quand on joue, finalement, que cherche-t-on ? On peut chercher à plaire, à avoir du succès. Bon, ce n’est pas mon propos. Quand on joue, je crois que l’on cherche à se libérer d’une parole que l’on porte en soi mais pour laquelle on ne dispose pas de tous les mots. Les grandes œuvres musicales, les grandes créations nous offrent cette chose extraordinaire : pouvoir exprimer, et le partager avec d’autres, ce qu’il y a de plus intime en soi, ce qui est au cœur même de notre per- sonne. »
Dans ce programme entre ombres et lumières, on attendrait un Mozart lumineux et un Schubert sombre. Ce sera l’inverse : un Mozart dont toutes les œuvres sont en mineur précèdera la grande Sonate en sol majeur D. 894 de Schubert.
« Oui. Dans les œuvres de ce programme, j’ai privilégié un Mozart drama- tique, un Mozart par certains aspects ... colérique ! Je trouve que le premier mouvement de la Sonate en ut mineur est une colère avouée. Alors que son dernier mouvement est ... hagard : il y a quelque chose de complète- ment perdu en lui. Quant à la Fantaisie, elle est opératique. Elle me touche beaucoup : Mozart a le sens du drame mis à la scène. Dans cette Fantaisie, il y a de l’orchestre, du chant accompagné, des moments de piano pur. Mozart a perçu tout ce que le piano allait être. Quel génie n’avait-il pas ?
Quand Mozart est dans le mode mineur, il est dans la tragédie de la vie. Dans la Fantaisie en ut mineur, dans le Rondo en la mineur, il y a une ex- pression d’une intensité qu’un interprète a ... une joie - il y a cela aussi - une joie à porter. Joie parce que finalement, l’expression créatrice d’un drame intérieur nous en libère. Parler, jouer, c’est toujours se libérer de quelque chose qui, tout d’un coup devient langage. Devient un lieu de partage. Je crois qu’il n’y a pas de vie possible, d’art possible, de culture possible,



























































































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