Page 30 - Milano
P. 30
Elle pleurait déjà depuis longtemps, elle avait porté le poids de la douleur seule comme si elle voulait nous épargner, nous tenir loin de ce sentiment que nul être sur terre ne voudrait côtoyer...
Elle avait tellement pleuré que bien qu’elle fût tout près de moi, ses mots restaient inaudibles comme si elle voulait encore un peu prolonger le sursis, mettre à distance ce coup fatal qui allait à coup sûr me terrasser. Maman avait commencé par me serrer très fort dans ses bras, préférant me garder ainsi blotti contre elle comme si elle pressentait que l’annonce qu’elle allait me faire me ferait ployer sous mon poids. Elle avait méticuleusement choisi et pesé chacun de ces mots afin qu’ils arrivent à mes oreilles de la manière la moins douloureuse qu’il soit, comme si l’horreur pouvait avoir du beau, une quelconque once de pitié envers ses victimes. Je ne me rappelle plus ce qu’elle m’a dit mais une phrase, une seule m’est restée à l’esprit : elle est partie...