Page 7 - MOBILITES MAGAZINE N°57
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    TRANSITION / ANALYSE
       gie à l’épreuve de la réalité
« Le monde de demain sera plus électrique... ». Tel est en substance
le message porté par le président de la République Emmanuel Macron le 10 février dernier à Belfort. A dire vrai, depuis que la transition écologique est devenue une référence de la vie politique, personne n’en doutait vraiment. Pour autant, se posent tout de même de nombreuses questions, plusieurs des « vérités » professées un peu partout
se heurtant en effet de plus en plus au mur de la réalité.
 Al’horizon 2050, selon la doxa qui prévaut aujourd’hui, l’Europe, et bien entendu la
France, devront être décarbonées. Les véhicules essence ou diesel, mais aussi les chaudières au fioul et au gaz auront, du moins dans l’esprit de nos dirigeants, disparus au seul profit des véhicules élec- triques et des pompes à chaleur. A ce jour, la France consomme quelque 1600 TWh d’énergie, toutes sources confondues, dont un peu plus de 472 TWh d’électricité, déjà produite à 93 % par des sources décarbonées (essentiellement nu- cléaires et hydrauliques). Le fameux rapport de Transport de l’Electricité (RTE) paru en octobre 2021, pré- senté comme l’Alpha et l’Omega de la vision d’avenir, s’alignait sur la Stratégie nationale bas-carbone du gouvernement, qui veut que cette consommation totale d’éner- gie diminue de 40 % à cet horizon et plafonne à 930 TWh. Ce présup- posé apparaît déjà pour le moins « audacieux », alors qu’un certain nombre d’autres études (sans doute moins idéologiques ?) tablent sur une croissance de la seule demande d’électricité qui atteindrait à minima 750 TWh par an, sauf à accepter
un déclin économique massif que d’aucuns baptiseront peut-être du terme plus « politiquement correct » de décroissance...
Pour autant, parmi les trois scénarii proposés par RTE, l’Etat aura re- tenu celui dit « de référence », qui envisage pour l’électricité une consommation de 650 TWh en 2050. Fait important, cette hypo- thèse de travail intègre un besoin de 100 TWh annuel pour faire rou- ler les 36 millions de véhicules électriques envisagés à ce terme (nous en serions aujourd’hui à moins d’un million tous types confondus...), et correspond, selon les propres termes du rapport, à une stabilisation de la part de l’in- dustrie dans le PIB à 10 %, soit en- core inférieure à ce qu’elle est au- jourd’hui. La réindustrialisation du pays, grande cause nationale de la campagne présidentielle en cours, est donc ici discrètement passée par pertes et profits, mais c’est un autre sujet.
Le cas emblématique
du mois de janvier 2022
A cette date, il faudrait, pour un mois de janvier climatiquement identique à celui de 2022, anticiper
une consommation de l’ordre de 130 GW (puissance disponible) en
(1)
pointe, soit plus de 75 000 GWh nécessaires sur la période.
Si l’on s’en tient au discours d’Em- manuel Macron, et toujours dans
le cadre du scénario de référence
de RTE, la France sera dotée en 2050 d’une capacité solaire de
100 GW. Or, si l’on se réfère à la production solaire des trois pre- mières semaines de ce mois de janvier 2022, sachant qu’avec
12 GW disponibles à ce jour, le parc solaire français a donné en moyenne 4,5 GW en pointe, c’est- à-dire à peu près 22,5 GWh par jour, soit un total de 472,5 GWh. Calcul complexe, ce qui explique sans doute l’absence de débats sé- rieux sur les plateaux de télé, et
qui laisse à penser qu’à l’horizon 2050, le solaire pourrait au mieux fournir peu ou prou 4000 GWh sur
un mois de janvier identique.
Toujours selon le discours du 10 fé- vrier, dans 28 ans, l’éolien passera
de 18 GW aujourd’hui, à un peu plus
de 70 GW (dont 40 GW en mer). N’en déplaise aux promoteurs de cette autre source d’énergie inter- mittente (EELV, ou l’Ademe par exemple) qui imaginaient volontiers u
MOBILITÉS MAGAZINE 57 - MARS 2022 - 7




































































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