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Le monde de la construction en plein virage 3D
Les technologies d’impression 3D, aussi appelée fabrication additive, sont en croissance un peu partout dans le monde. Ces équipements permettent de reproduire pratiquement n’importe quel objet à partir d’un fichier informatique représentant la pièce en trois dimensions.
Dans le milieu manufacturier et les centres de recherche, plusieurs sont d’avis que la fabrication additive contribue à la révolution industrielle en cours. Le potentiel de cette technologie est énorme puisqu’elle permet la production rapide et à faible coût de pièces, peu importe leur complexité. Ainsi, des objets sont fabriqués à partir de données d’un modèle 3D, générale- ment par la superposition de plusieurs couches successives de matière : plastique, métal, céramique, verre et matériaux composites.
Voyons comment ce procédé est en train de se tailler une place dans le milieu de la construction au Québec et les changements annoncés par cette technologie perturbatrice.
Ma maison 3D au Canada
Les maisons imprimées 3D existent déjà au Canada, soit dans le cadre de projets pilotes ou pour démontrer la faisabilité du concept.
La première et la plus célèbre de cette construction imprimée est en Colombie-Britannique; surnommée la maison Fibonnaci en raison de sa structure courbée; elle attire l’attention des médias, d’autant qu’elle est offerte en location sur AirBnB.
Le prototype a été construit par Twente Additive Manufacturing (TAM), une entreprise en démarrage canado-européenne, basée aux Pays- Bas. Le président de la compagnie, Ian Comishin explique le concept :
«L’expertise de notre compagnie c’est la robotique industrielle, tant le dessin que la fabrication des machines pour imprimer. En termes de processus manufacturier, la révolution c’est qu’au lieu de couper quelque chose, on ajoute les matériaux. Aujourd’hui, le seul matériau qui est assez fort pour fabriquer des maisons avec l’impression 3D, c’est le béton. C’est bon pour la construc- tion de la fondation et de murs. Et c’est très facile à faire. »
M. Comishin et son équipe ont d’abord fait leurs armes dans l’industrie éolienne, spécifiquement l’automatisation du trans- port de pales de 70 mètres de long, pour ensuite se lancer dans la fabrication d’imprimantes 3D.
«Notre mission est de convaincre l’industrie de la construction que la conception assistée par ordinateur (Computer Assisted Design ou CAD) peut aider à contrôler les coûts sur un chantier. On le sait, sur un chantier résidentiel traditionnel, les surprises et les retards sont des réalités quotidiennes qui entraînent régu- lièrement des dépassements de coûts. »
L’imprimante 3D est déjà très utilisée avec le plastique et de plus en plus avec l’acier ou autres formes de métal. Avec le béton, qui est une matière visqueuse, c’est un peu plus compliqué, explique M. Comishin.
«Le défi c’est de s’assurer que le matériau demeure stable, sans se déformer ou se déchirer. Cela prend des machines d’une grande précision pour avoir la bonne quantité d’eau, de produits chimiques et de gravier ou de sable. »
Twente Additive Manufacturing fabrique des imprimantes 3D pour le béton à Hemmingford, au sud de Montréal. Une vingtaine de leurs imprimantes ont déjà été vendues aux Pays-Bas, au Japon et à Dubaï.
«Nous vendons aussi aux universités pour faciliter la formation des étudiants en architecture et en construction 3D. D’autres formes d’imprimantes 3D peuvent servir pour agrandir une maison par exemple, ou pour construire les cadres de fenêtres ou les pièces esthétiques. »
Pour Stephan Mansour, spécialiste de la fabrication additive et consultant chez Wohlers Associates à Toronto, l’impression 3D ne représente ni la panacée ni la révolution, mais bien l’évolution nécessaire d’une industrie reconnue pour son conservatisme.
«L’impression 3D est comme n’importe quel autre outil de construction, comme une excavatrice ou une grue. L’impression 3D ne va pas supprimer tous les emplois en pesant sur un bouton où tout se passerait par magie. Mais cette technologie sera utile en pénurie de main-d’œuvre et en période de coûts de matériel élevés. En fin de compte, il s’agit d’un outil pour améliorer les choses et les rendre plus efficaces, plus productives, plus sécu- ritaires et plus écologiques. »
M. Mansour est d’avis que le caractère high-tech du 3D va encou- rager les jeunes à faire carrière dans la construction du fait que la robotisation éliminera les aspects les plus difficiles du métier, comme l’effort physique.
    Ian Comishin est le président
de Twente Additive Manufacturing qui fabrique des imprimantes 3D pour la construction partout dans le monde à partir d’Hemmingford au Québec.
Combien coûtent les imprimantes 3D pour le béton?
La compagnie Twente Additive Manufacturing fabrique diffé- rents types d’imprimante 3D. Une de ces machines à la capa- cité de construire un quartier en entier ; elle est vendue au coût de 1,7 million de dollars canadiens. Des machines plus petites, utiles pour la recherche universitaire, se vendent 150 000 $.
 HIVER 2022 • AQMAT MAGAZINE 15
L’imprimante Tilikum est un robot fabriqué et vendu par Twente Additive Manufacturing. Composée de sept axes
et installée sur remorque mobile tirée par un camion d’une tonne, cette machine vendue au coût de 425 000 $ a la capacité d’imprimer 500 pi ca, en 12 heures.
C’est le meilleur vendeur, représentant
la moitié des ventes de TAM.
 







































































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