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Pour comprendre la mission de votre entreprise et son produit, il faut remonter
à vos premières expériences dans la construction.
mon père, qui n’avait qu’un bras, était, comme on dit chez nous, un « bazouteux ». Il réparait des
choses dans son garage, et j’étais là pour l’aider. Ce qui m’a initié à la mécanique, que j’ai ensuite étudiée. mais, j’aimais davantage le grand air, et je suis parti tra- vailler à la Baie-James, à LG2, par la suite, dans certaines réserves autochtones. entre-temps, j’ai fondé une famille et eu trois enfants. Je suis revenu travailler dans le sud, mais il y avait moins d’ouvrage. C’est à ce moment que j’ai démarré une compagnie de construction résidentielle, afin de pouvoir travailler près de chez moi.
Vous avez remarqué qu’à l’époque, on construisait d’une manière, et cela vous choque
que l’on construise encore pas mal de la même façon aujourd’hui...
L’idée derrière venait du fait que les maisons construites dans le nord n’étaient plus bonnes après
7 ou 8 ans à cause de l’humidité, et que les résidents ne prenaient pas soin des bâtiments. Je suis resté avec l’idée d’amé- liorer ça.
Puis, vous lancez les Habitations du Patriote.
Quand j’ai travaillé dans le nord, l’hiver était rude, et j’allais travailler comme mécanicien et soudeur
dans des scieries, notamment chez m. Barrette, à Chapais, qui avait un moulin de haute technologie. J’y ai pris de l’expérience en machinerie, tout en ayant ma compagnie de construction. Lorsque mon associé a racheté la compagnie, et que j’avais une clause de non- concurrence de cinq ans, il a fallu que je me renouvelle.
un jour, en passant dans le parc des Laurentides, j’ai croisé un homme qui sculptait des maisons à la main. Je lui demande : ça vaut combien, et quels sont les délais de livraison ? Il répond : « 45 $ du pied et deux ans d’attente». une étin- celle d’entrepreneur s’allume : puis-je faire quelque chose avec ça, et plus vite ? J’ai alors utilisé mon garage pour fabriquer une machine capable de produire du bois rond, mais usiné.
J’ai eu beaucoup de succès parce que j’avais un délai de livraison de six semaines pas de deux ans. Au lieu de présenter des murs de bois permettant l’entrée d’air, ma maison était étanche, et il y était facile de poser les armoires de cuisine sur le mur. La mode était aux grandes maisons en bois rond dans l’ouest du Canada, et on l’a amené au Québec...
C’était des années où l’on commençait à voyager dans le Maine ou d’autres États
américains, et que l’on voyait que le bois était mis en valeur, alors qu’ici on s’en servait comme structure pour ensuite y ajouter du stuc. C’était de belles années pour valoriser ce produit, mais vous avez quand même vendu l’entreprise.
J’ai vendu parce que je suis un homme de défi. Le bois rond, c’est un produit marginal, et j’avais tout
fait ce qui était possible dans le nord-est de l’Amérique. Il était temps de passer à autre chose. J’avais le projet oSBLoCK en tête, et je voulais rejoindre encore plus de monde avec un nouveau produit.
Donc, on parle de cette idée qui permet à un mur d’avoir une isolation incorporée de
haute qualité, et de réduire le temps d’assemblage. C’était ce que vous aviez en tête ?
Je voulais une usine exportable, qui fasse toujours le même produit. C’est pourquoi j’ai ramené
oSBLoCK en version huit pieds de lon- gueur, avec quatre à cinq accessoires. Avec ça, on peut faire n’importe quoi. Je voulais aussi entreposer et livrer sans délai d’attente.
Il n’y a pas de problématique de vissage ?
non, on a développé un système de clips pour les assembler. Cela prend une perceuse, une scie
mécanique pour couper les blocs, et un niveau. on met ça dans le coffre arrière et on part. Pas besoin de remorque.
En voulant amener un si grand changement dans cette indus- trie, vous avez frappé un mur,
aussi résistant que le vôtre...
Cela a été le plus grand défi (rires).
Parlez-nous un peu de ces cinq années de combat. Vous gagnez, mais cela ne se fait pas facile-
ment parce les gens ont leurs habi- tudes, et qu’il faut trouver parmi les constructeurs, designers et architectes, des gens ouverts au changement.
Automne 2021 AQMAT MAGAzINE 33