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La remise en question des logements au sous-sol
Dans un contexte de pénurie de logements, de changements climatiques et de risques assurables,
la question des sous-sols va demeurer au cœur de l’actualité pour les prochaines années. D’autant plus que le gouvernement du Québec, en collaboration avec les municipalités, s’apprête à moderniser
la réglementation liée aux zones inondables en s’appuyant sur une nouvelle cartographie.
D éjà à Montréal, la mairesse Valérie Plante annonce que la construction de nouveaux logements en sous-sol
pourrait être interdite en cas de risque d’inondation.
Résilience et stratégies d’adaptation
L’Association professionnelle
des constructeurs d’habitation
du Québec (APCHQ) est formelle :
« On ne peut plus simplement nettoyer et refaire à l’identique
en attendant le prochain sinistre. C’est ce qui se passe actuellement. On doit adapter nos résidences
à la recrudescence des aléas climatiques. Ce n’est plus une option, c’est une responsabilité collective », insiste Marco Lasalle, directeur du Service technique.
L’organisme conseille donc aux proprié- taires de réfléchir à leur utilisation de cet espace, notamment en repensant aux meubles et objets qui y sont entreposés et aux matériaux utilisés pour cette partie de la maison.
L’APCHQ propose les mesures tech- niques suivantes :
• utilisationdematériauxrésistants à l’eau dans les sous-sols
et les garages;
• installation de systèmes d’évacuation des eaux de drainage améliorés;
• adaptation des équipements électriques et mécaniques;
• miseenplacedebarrières anti-inondation amovibles pour les portes et fenêtres des sous-sols;
• aménagementpaysageradapté autour des résidences pour favoriser l’écoulement de l’eau loin des fondations.
« Au-delà du débat ponctuel sur les sous-sols, l’industrie de la construction doit repenser sa façon de construire — et de reconstruire - de manière plus géné- rale. Il faut aussi réfléchir aux matériaux utilisés, insiste le professeur Lizarralde. Par exemple, il est insensé d’installer des tableaux électriques au sous-sol aujourd’hui ou de choisir un plancher en bois pour cet espace. C’est inac- ceptable de rénover un sous-sol avec les mêmes matériaux et dans les mêmes conditions, surtout si de l’argent public est impliqué. »
À ce sujet, le BAC confirme que les assureurs n’ont pas d’exigences ou de recommandations au moment du sinistre, car le règlement est en fonc- tion du contrat et celui-ci vise à permettre à l’assuré de recouvrer ses biens et son habitation dans l’état où ils étaient avant le sinistre.
« Lors de la réparation des dommages, les matériaux doivent être de qualité semblable à celle des matériaux présents avant le sinistre, souligne Anne Morin. Cependant, l’assuré peut discuter avec son assureur de la possibilité d’utiliser des matériaux plus résistants et prendre une entente quant à l’indemnité qui pourrait lui être versée. »
Dossier Sous-sols
L’enjeu des sous-sols comporte deux volets bien différents, explique Gonzalo Lizarralde, architecte
et professeur à l’Université
de Montréal. « Dans les maisons unifamiliales, les usages
du sous-sol — bureau, salle de jeu, etc. — ne sont pas essentiels
au fonctionnement d’une famille au quotidien. Mais la situation est bien différente lorsqu’on parle des bâtiments qui abritent des logements en semi-sous-sol, car ils servent précisément, dans
le système actuel, de logements abordables. Interdire ce type
de logement aurait un impact
sur la crise du logement qui sévit. »
Cependant, le débat public à ce sujet est essentiel, poursuit l’architecte. «On doit commencer à réfléchir, en tant que société, à ce qu’on va faire de ce parc immobilier situé aux sous-sols dans des zones à risque d’inondation. D’autant plus que les assureurs annoncent déjà qu’ils ne pourront pas assurer des bâtiments qui, selon la nouvelle cartographie à venir, représentent un risque. »
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