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 La viande du monde en morceaux
Si nous regardions les objets autour de nous, découpés suivant les lignes de notre action possible – comme les représentations du cochon chez lequel « tout est bon », le porc découpé en pointillés : oreilles, tête, pieds, travers, jambonneau, côtes premières et secondes... La longe...
Dans de nombreuses œuvres aborigènes traditionnelles ou contemporaines, l’oie sauvage ou le kangourou sont dessinés en morceaux prédécoupés : sont figurés les organes internes, parfois le squelette, et surtout, inscrit à l’intérieur même du corps les découpes de la viande. La projection dans le corps de l’animal de la structure même des classes de la société, des obligations des parents qui doivent se partager la viande de façon réglée, donne à voir un « prototype totémique » immobile, comme un patron de couturière inerte, sans fond et sans environnement.
Les dessins de Frédéric Dupré sont peut-être aux objets ce que la viande prédécoupée est à la bête : une superposition à sa totalité organique de son démembrement pour et par esprit et notre estomac.
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