Page 37 - Lulu Magazine
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 Comment s’est fait le choix du titre ?
Le titre s’est imposé très vite. Quand Annie m’a confié son histoire et m’a parlé de ces dix-sept valises. J’ai su tout de suite que l’on tenait là le titre du livre. Car ces dix-sept valises ont marqué une rupture dans sa vie. Généralement, c’est toujours difficile de trouver un titre. Il faut que cela accroche, qu’il est un lien avec l’histoire. Il faut en deux, trois mots trouver l’essence de toute une histoire.
Selon vous, quel lien unit l’écrivain et le lecteur ?
Il y a un lien très fort qui se crée entre l’écrivain et le lecteur à travers le roman. Car alors qu’ils ne se connaissent pas du tout, le lecteur est amené dans histoire par les émotions et par les sentiments et non par le côté pragmatique. Il rentre dans une histoire qu’il s’approprie en fonction de son vécu, de ses émotions. J’ai perçu la dimension de ce lien avec Zebraska. J’ai eu un énorme de retour de lecteurs qui me confiaient : vous m’avez aidé. Car dans le roman, l’héroïne est une maman qui fait tout ce qu’elle peut, qui fait des erreurs, a des peurs, qui est un être humain. Elle a un enfant qui souffre de troubles autistiques. Dans les livres plus scientifiques qui parlent de ce sujet, on aborde le rôle de la maman de façon plus technique. Des mamans se sont retrouvées dans ce livre et ont senti qu’elles n’étaient pas seules à vivre ce qu’elles vivaient. Cela les a nourries et rassurées. Le roman a ce pouvoir car il n’a pas l’intention première de faire réagir. L’écrivain écrit d’abord pour lui. Puis les choses se font. Quand je lis un roman qui me parle beaucoup. Il me suit pendant des mois et parfois cela débloque en moi plein de petites choses de l’ordre de l’émotion.
Quel est le lien entre thérapie et écriture ?
J’anime des ateliers littéraires. J’apprends à utiliser les mots pour guérir des maux. L’écriture peut être un véritable pansement. Les mots libèrent les émotions, extériorisent les sentiments. Ecrire est un des outils les plus puissants pour porter un autre regard sur une réalité parfois douloureuse et offre le pouvoir de s’en détacher. J’éprouve un sentiment très fort quand j’aide les personnes à se libérer d’une blessure psychologique ou physique.
Depuis quelques années, j’accompagne dans l’écriture des personnes atteintes du cancer. J’y ai découvert la preuve de ce dont j’étais déjà convaincue : le pouvoir de l’écriture créative est immense. Elle est capable de transporter au-delà du cercle dans lequel nous nous enfermons (que l’on soit malade ou non) et
qui nous empêche de goûter au bonheur. Je me suis aussi rendu compte que ce qui était devenu évident pour moi dans le concept créatif ne l’était pas pour tout le monde : mettre ses sens à l’affut, se mettre dans la peau de..., être ici et maintenant, ne pas juger ce qui nous traverse l’esprit. Mes ateliers ont alors évolué vers des rencontres centrées sur une écriture de « pleine conscience » où la technique d’écriture, bien que présente, laisse la priorité à la recherche du bien-être, de la liberté d’être soi et du partage à travers une créativité aiguisée et sans jugement. Écrire, c’est s’arrêter et prendre conscience de qui on est et ce que l’on désire.
Les dix-sept valises
Isabelle Bary Collection Sméraldine Editions Luce Wilquin
« LA QUESTION DE L’INSPIRATION N’EST NI PLUS NI MOINS QU’UNE RESPIRATION » ISABELLE BARY
LULU RENCONTRE
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