Page 10 - Lux in Nocte 15_Float
P. 10
Suit un bel Air de cour de Michel Lambert (1610 – 1696), Maître de musique de la Chambre
du Roi, dont la fille Madeleine épousera Jean-Baptiste Lully, écrit en 1659, Sombres déserts,
retraites de la nuit dont le texte a été écrit par Jacqueline Pascal, sœur de Blaise Pascal, qui fut
religieuse à Port-Royal des Champs sous le nom de sœur Sainte-Euphémie :
Sombres déserts, retraite de la nuit,
Sacré refuge du silence,
Un malheureux à qui le monde nuit,
Ne vient pas par ses cris vous faire violence ;
Son tourment est si beau, qu'il n'en veut pas guérir,
Il ne vient pas se plaindre, il ne vient que mourir.
Par son tréspas dans les lieux fréquentez
On sçauroit les maux de son âme :
Mais dans ces bois toujours inhabitez
Il vient chercher sa mort pour mieux cacher sa flame,
Ne craignez pas ses cris en le voyant périr,
Il ne vient pas se plaindre, il ne vient que mourir.
Moment méditatif, avec la Sonate en quatuor opus 1 écrite en 1709 par Louis-Antoine Dornel
(1680 – 1757) organiste réputé de l’église Sainte Marie Madeleine en la Cité, autrefois sur l’île
de la Cité, en remplacement de Jean-Philippe Rameau qui, choisi par le jury dont faisait partie
Jean-François Dandrieu, refuse finalement le poste.
Autre pièce intimiste, la Quatrième Sonate en trio pour 2 flûtes, tenues par Thomas Lecomte
et Valérie Balssa-Jaffrès qui font merveille, et basse continue de Jacques-Martin Hotteterre
(1674 – 1763), flutiste reconnu qui entre en 1705 à la Chambre du Roi.
Suivent deux airs de Michel Lambert, Ah puisque la rigueur extrême, issu du recueil Airs à
Une, II, III et IV Parties paru en 1659, dont le texte est du compositeur lui-même, puis Pour
être aimé, air à 3 voix mixtes, tiré du Livre d’Airs de Différents Auteurs de 1662. Le texte est
du poète Pierre Perrin, dit l’abbé Perrin, auteur du livret Pomone considéré comme le tout
premier opéra en français :
Pour être aimé le secret est d’aimer,
Pour enflammer, il faut être enflammé :
Ce n’est pas tout de plaire & de charmer
Pour être aimé le secret est d’aimer.
Évocation incontournable des années Lully avec un extrait de la « Tragédie mise en Musique »
Atys, le livret étant de Philippe Quinault, créée au château de Saint Germain en Laye en 1676
en présence de Marin Marais, violiste, et Jean-Henry d’Anglebert, claveciniste, avec l’ineffable
Le Sommeil d’Atys, prélude de la scène IV de l’acte III « Dormons, dormons tous ». Les
musiciens du Roi réunis ensemble pour ce prélude peuvent exprimer avec tant de présence ce
sentiment particulier du baroque français dont l’héritage est toujours vivant.