Page 29 - Bulletin, Vol.78 No.2, June 2019
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VERRA T’ON LES MUSÉES SE VIDER DE TOUTES
LES COLLECTIONS ?
Par Odette FOUDRAL
Je dois dire que cette option me peinerait beaucoup. Il est si intéressant de voir les
œuvres de différents pays exposées côte à côte. Mais un grand bravo au Sénégal pour
son initiative de renouer avec son passé.
Je comprends cependant bien que certaines œuvres ont été volées lors de la
colonisation, lors des guerres, parfois sous couvert de bons sentiments, parfois avec
l’idée que seuls les européens étaient dignes d’apprécier l’art, parfois même plus
sournoisement pour rabaisser la culture des pays colonisés.
Si on reprend la définition de WIKIPEDIA on est hélas bien dans cette approche. Que
sont donc les arts premiers pour ne pas dire primitifs !
Jacques Kerchache, marchand d'art et spécialiste en art africain, essaie dès le début
des années 1990 de faire entrer les « arts premiers » au musée du Louvre. En 1990, il
signe dans le journal Libération un article sur ce sujet et rencontre ensuite Jacques
Chirac, alors maire de Paris. Ce dernier, qu'on dit passionné par les « arts premiers »,
est élu président de la République en 1995. Dès son arrivée à la tête de l'État, il
demande l'ouverture d'un département des arts premiers au musée du Louvre. Un an
plus tard, il annonce le projet de création d'un nouveau musée, qui rencontre
rapidement une opposition interne, suivie en 1999 d'une grève des agents du musée de
l'Homme, qui contestent le démantèlement de ses collections et critiquent la primauté
du choix esthétique au détriment des considérations scientifiques. En effet, les
collections du musée national des Arts d'Afrique et d'Océanie (MAAO), fermé en 2003,
sont également destinées à y être transférées depuis le palais de la Porte Dorée.
Il sera cependant bien difficile de rendre par exemple les trésors des Incas alors que l’or
a été fondu pour faire disparaitre à jamais toute une civilisation.
Mais revenons un peu à la problématique d’un retour de toutes les œuvres vers leur
pays d’origine. Ce serait aussi oublier que nombre d’entre elles ont ainsi été préservées
du pillage à but privé, des guerres, parfois découvertes enfouies dans les forêts depuis
des siècles… Ceci semble bien souvent un faux prétexte pour le vol des objets
culturels. Cela a été le cas par exemple avec la frise du Parthénon, encore aujourd’hui
réclamée par la Grèce au British Muséum.
Est-ce à dire cependant que les
œuvres découvertes appartiennent
au découvreur ? L’Egypte par
exemple a mis sur pied une politique
stricte en matière de fouilles
archéologiques et les pièces restent
au pays. Des règles internationales
ont été édictées par l’UNESCO
AAFI-AFICS BULLETIN, Vol. 78 No. 2, 2019-06 27