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Légendes
L'Eldorado n'était pas un rêve. C'est l'esprit humain qui détermine la différence entre le rêve et la ré- alité. Peu importe qu'un objet dont on est convaincu de l'existence existe aussi matériellement : croire à son existence suffit à le rendre réel. Les conquistadores espagnols ne doutaient pas de l'existence de l'Eldorado. Le pays de l'or se trouvait quelque part dans une lointaine contrée inex- plorée : son roi était couvert d'or et sa capitale était en or...
EL DORADO : L'OR PERDU DU LAC DE GUATAVITA
C'est une coutume des Indiens Chibcha qui est à l'origine du mythe. Une fois par an, le chef (recouvert d'or en poudre) allait dans l'eau du lac de Guatavita (le lac existe toujours aujourd'hui en Colombie) pendant que les
siècle, l'espagnol Juan Rodriguez Freyle, qui l'a fixée par écrit, en s'appuyant sur les récits de son ami don Juan, un neveu du dernique de Guatavita.
Ces païens n’y avaient-ils pas, depuis des temps immémoriaux, jeté des objets en or en offrande à on ne sait quels démons et idoles ? Les quantités fabuleuses de trésors englouties par le lac, ces pierres et ces métaux précieux,
devaient faire luire ses profondeurs d’un chatoiement irréel.
villageois lançaient des objets d'or ainsi que d'autres objets précieux dans l'eau.
L'« homme doré » de cette cérémonie, qui re- monte aussi loin que la mémoire des Indiens, donna naissance aux récits concernant le cé- lèbre El Dorado « le doré », qui éveilla la soif d'or des Européens et les poussa, à travers la jungle et ses périls, par-delà les chaînes de montagnes glacées, à la recherche du lac de Guatavita.
Sans cesse, les conquistadores entendaient cette histoire, et c'est un chroniqueur du XVIe
A LA RECHERCHE DU TRÉSOR DE GUATAVITA Lorsqu’il s’agit de traquer la richesse, l’esprit humain se révèle extrêmement ingénieux. D’inestimables trésors dorment au fond du lac de Guatavita ? Qu’à cela ne tienne, il doit bien y avoir un moyen d’exploiter cette mine d’or.
Si l’attention des conquérants se tournait vers ce lac, c’était pour une raison bien simple : les Indiens eux-mêmes n’avaient pratiquement plus d’or. Tout ce qu’ils possédaient avait été pillé depuis longtemps. Mais ce lac et les lé- gendes qui s'y rattachaient étaient dans tous les esprits.
Parmi tous ceux que cette pensée préoccupait, Lázaro Fonte fut le pre- mier à s’occuper sérieusement des choses. Il était officier dans le corps expéditionnaire de Gonzalo Jiménez de Quesada. Ses efforts n’eurent pour- tant aucun succès notable, car il man- quait d’argent et de moyens.
Vers 1545, le frère de Quesada, Her- nân Pérez, définit un plan d’une sim- plicité géniale : il allait vider le lac ! Il rassembla des Indiens, donna à cha- cun l’une des calebasses qu’il avait fait préparer et leur fit faire la chaîne sur la rive du lac de Guatavita. Comme il avait attendu la saison sèche pour opérer, ses gens réussirent effective- ment à faire baisser le niveau de l’eau de 3 mètres en trois mois. Les hom- mes trouvèrent quelques objets de va- leur. Des récits de l’époque parlent de
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l’équivalent de 3 000 à 4 000 pesos d’or... Mais ce fut tout !
Une nouvelle tentative de récupération, tout à fait remarquable, eut lieu en 1580 : elle fut l’œuvre de Antonio de Sepúlveda, un riche marchand de Santa Fé de Bogotá. Bien que peu originale, son idée, vider le lac, fut menée habilement. Il transforma les rives en un im- mense chantier.
Ayant embauché 8 000 Indiens, il leur cons- truisit des maisons et vint à bout des difficul-


































































































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