Page 31 - Rebelle-Santé n° 227
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  RENCONTRE
  de comprendre. On prendra le temps de creuser, de réfléchir, de donner du sens. Les outils analytiques prennent ici toute leur place. Les prises de conscience deviennent alors des ressources actionnables.
Dans tous les cas, il faut soigner la relation à soi- même : c’est la clé. Au cœur du problème que l'on regarde, il y a toujours une émotion cachée, une petite voix qui tourmente, un diablotin qui sort régulièrement de sa boîte pour nous maltraiter, même si on essaie de le faire taire. Il est plus efficace, au contraire, de prendre le temps de l'écouter, afin de pouvoir changer les choses durablement !
Quel est le plus important avec son thérapeute ?
La confiance. Souvent, il faut plusieurs séances pour apprendre à se connaître, pour créer un lien sécuri- sant. C'est cette sécurité qui va permettre d'aller re- visiter des endroits souffrants pour les soigner - par exemple une petite voix qui dit « je ne vaux rien » peut remonter à quand on était tout petit et que les parents ou la maîtresse trouvaient nos dessins nuls, et nous influencer encore au présent. Quand on aura désamorcé l’émotion ancienne, la petite voix n’aura plus lieu d'être. C'est la confiance qui permet de faire ce travail.
Est-ce le même mécanisme en cas de surpoids ?
Bien sûr ! Si mon apparence ne me plaît pas, je me compare (aux youtubers, à ma sœur...), et je vais vou- loir suivre un régime pour me "normer", pour amélio- rer ce qui me dérange. Mais en réalité, mon corps ne fait que manifester ce que je pense de moi : si je ne m'aime pas, mon corps va le refléter en se montrant "pas aimable". Ce n'est pas en lui reprochant encore plus d'être comme il est que je vais améliorer les choses. C'est en restaurant la relation avec moi-même, en me traitant mieux, que mon corps va changer. Si je m'aime davantage, je vais probablement améliorer ma façon de m'alimenter, mais dans l'objectif de prendre soin de mon corps comme d'une chose précieuse, non de le traiter comme un problème à corriger. Cela semble proche mais en réalité ça fait toute la diffé- rence.
Quel est le meilleur modèle à suivre pour aller mieux ?
Je suis fascinée par l'enfant. Il vit son émotion, tout de suite, de façon totale. La tristesse se manifeste comme un désespoir absolu... mais quelques secondes plus tard, il part jouer, c’est terminé. L'émotion a été vécue, pleinement, elle est passée. Tandis que nous, adultes, refoulons nos émotions, et les ennuis commencent. L'émotion est le support de toute relation humaine,
c'est le moteur de la vie, même si elle est parfois dou- loureuse ou désagréable.
Vous proposez du coaching en entreprise, cela consiste en quoi ?
Mon objectif, c'est d'aider les personnes à avoir de meilleures relations avec eux-mêmes, et par rico- chet entre eux. Les attitudes deviennent plus bien- veillantes, notamment sur le plan managérial. Il y a beaucoup de souffrance dans le monde du travail. Elle provient souvent de malentendus, et de projections que l’on fait sur les autres.
Exemple 1, le sens des mots diffère. Pour celui qui parle, le message est évident, alors qu’en face, la per- sonne entend autre chose.
Exemple 2, faire abstraction des émotions. Réduire quelqu’un à ses compétences professionnelles sans te- nir compte de son vécu émotionnel conduira toujours à des conséquences indésirables, qu’on le déplore ou non.
Avez-vous eu des échecs ?
Bien sûr, je suis humaine, je fais des erreurs ! Mais le mot échec ne me convient pas, car même si en appa- rence l'objectif ne semble pas atteint, on a toujours mis quelque chose en mouvement qui peut se révéler fructueux plus tard, au fil de la vie de la personne. Une thérapie ou un coaching, c’est avancer ensemble, donc si échec il y a, c’est un échec à deux. Si au fond d'elle la personne ne veut pas être aidée, je peux dé- ployer tout mon savoir-faire, ça ne marchera pas. À l’inverse, avec une personne super déterminée à avan- cer, même si je ne suis pas très en forme, nous obtien- drons d’excellents résultats.
Propos recueillis par Anne Dufour
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