Page 15 - Rebelle-Santé n° 232
P. 15

   cela a été une grande transforma- tion pour moi et une occasion de reconnexion à l'autre, notamment avec les guides, les sherpas, les clients. Cela m'a permis de voir que l'autre, c'était moi.
Vous avez décidé de lancer
le projet « Clean Everest ». Comment s’est fait le passage à l'acte ?
Ça a été très simple. Je suis allée sur l'Everest car je travaillais déjà avec des guides tibétains qui vou- laient réincorporer les valeurs tibétaines dans leur activité parce qu’ils se trouvaient perdus dans cette course aux profits. C’est ainsi qu’en 2011 j’ai donné des cours sur l'environnement dans leur compagnie de guides à Lhassa. Ensuite, j’ai gravi de petits som- mets avec eux, pour comprendre les enjeux écologiques. En 2013, je suis allée jusqu'au sommet de l'Everest une première fois avec eux pour faire un diagnostic des déchets sur place. Là, j'ai vu l'am- pleur du problème. Heureusement les 100 guides de cette agence d'expédition étaient déjà mobili- sés et partageaient cette vision de protection de la montagne. J’ai aussi impliqué le plus d'étrangers possible pour que ce soit un tra- vail commun et pour bénéficier de quelques compétences notamment de structuration. Ensuite, j’ai aidé les guides à rédiger ce qui allait devenir la charte officielle de pro- tection de la montagne.
Était-ce compliqué de descendre les déchets ?
Très compliqué. Selon les diffé- rentes altitudes, ce sont des trans- ports à dos d'homme ou avec des yaks. Ensuite, à partir du camp de base, on utilise des camions, pour redescendre les déchets jusqu'au bout de la chaîne de recyclage. La moitié des déchets était à 6500 m, altitude que très peu de gens peuvent atteindre. Cela a pris du temps pour trouver des
personnes capables de monter si haut. Au-dessus de ces zones, les bénévoles ne peuvent même plus monter, ce sont les sherpas qui s’y rendent pour transporter du maté- riel d'expédition, mais ils redes- cendent à vide. On leur a donc demandé de rapporter les déchets et on les payait au kilo, pour leur fournir quelques revenus supplé- mentaires.
Comment cela a été financé ?
Mes sponsors m’ont aidée pour les trois premières expéditions. Après, les Tibétains eux-mêmes ont créé un livre de photos de haute mon- tagne qu'ils ont vendu pour payer les kilos de déchets redescendus des différents camps. Ensuite, le gouvernement s'est impliqué et de nombreux fonds sont arrivés. J’ai réfléchi à la sensibilisation pour faire descendre cet écolabel « Clean Everest » dans la plaine et partout où il y a des montagnes, pour protéger les sites contre la pollution.
Vous soignez la montagne, et vous, comment vous soignez-vous ?
Surtout par la prévention. Avant d'être malade, je suis à l'écoute de tout ce qui peut m'aider à res- ter en bonne santé. J'ai appris énormément de la médecine
ayurvédique, avec une alimenta- tion très précise sur ce qui me fait du bien ou pas. Cela a toujours étonné les alpinistes chinois de me voir faire l’Everest sans manger de viande car je suis végétarienne, quasiment vegan. Je pratique des méthodes issues de la médecine taoïste pour garder mes organes en bonne santé. Je les contacte, je les observe, je leur souris, je leur envoie des énergies quand je sens qu’ils faiblissent un peu. Et cette conscience m’aide à maintenir ces équilibres internes. En fait, je ne suis jamais malade et je ne prends pas de médicaments.
Où se joue l'avenir pour vous ? Au Tibet, en Europe ?
Au Tibet, mon cœur me porte vers la restauration des écosystèmes fra- giles. En Europe, je suis disponible à ce qui peut s'y passer, surtout en ce moment. Je pense notamment à la compassion envers soi-même pour tous les personnels soignants. Pour savoir prendre soin de soi. Pour comprendre où se situent l'empathie et la résonance avec la souffrance de l'autre, et comment transformer cette souffrance pour rester disponible et connecté à ses ressources.
Propos recueillis par Christophe Guyon
  Rebelle-Santé N° 232 15
NATURE
POUR PLUS D’INFORMATIONS
Respire, tu es vivante
de Marion Chaygneaud-Dupuy, Éditions Massot. 20,90 €
(ebook : 15,99 €).
Si vous ne trouvez pas ce livre, consultez le site
www.placedeslibraires.fr
vous aurez les adresses de toutes les librairies où il est en stock.
Une partie des recettes de la vente du livre sert à financer des projets écologiques et humains au cœur du Tibet :
www.highland-initiatives.com
   








































































   13   14   15   16   17