Page 43 - Rebelle-Santé n° 214
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ÉDUCATION
Les lecteurs de notre magazine connaissent bien l’importance du microbiote intestinal sur notre santé, nos humeurs et nos comportements. Une exposition à la Cité des Sciences, à Paris jusqu’au 4 août, s’inspire du best-seller de Giulia Enders, Le charme discret de l’intestin* en célébrant cette découverte révolutionnaire.
Sans doute pourrait-on parler de révolution du microbiote comme nous parlons de révolution copernicienne, quand Copernic et Galilée
renversaient la représentation du monde occidental en vérifiant l’hypothèse que la terre tournait autour du soleil. Il en est de même avec les microbes (terme générique pour désigner les micro-organismes), longtemps ciblés comme des ennemis à abattre. Seraient-ils finalement les meilleurs compagnons de l’humain ?
La première bactérie fut observée au microscope au XVIIe siècle. Mais les travaux de Pasteur, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, ont démontré le rôle des micro-organismes comme agents infectieux avec pour conséquences l’identification de nombreuses maladies, la prise en compte de l’hygiène, la découverte des antibiotiques, mais aussi la diabolisation pathogène des bactéries. Entre-temps, d’autres découvertes avaient permis de mettre en évidence les effets positifs des bactéries probiotiques à l’origine de la fermentation naturelle comme les yaourts et la choucroute. Élie Metchnikoff, prix Nobel de médecine en 1908, est ainsi le premier à avoir pensé à injecter des bactéries saines dans nos intestins afin de renforcer notre système immunitaire.
CE PATRIMOINE GÉNÉTIQUE INSOUPÇONNÉ
Grâce au développement de la bactériologie, et face à l’apparition des bactéries super résistantes, la science a cherché à mieux connaître ces micro-organismes en perfectionnant les méthodes de culture et d’observa- tion en laboratoire. Avec la miniaturisation et les sta- tistiques, les outils se perfectionnent et aujourd’hui, en examinant les selles, on est capable de mettre en évi- dence les résidus génétiques de milliards de bactéries.
Les bactéries sont beaucoup plus petites que les cel- lules humaines, mais elles sont aussi dix fois plus nombreuses. Les notions de microbiote et de micro- biome rendent mieux compte de la symbiose et de la communication permanente de nos cellules avec ces microbes, en désignant l’ensemble de ces micro- organismes, le milieu où ils vivent mais aussi la somme réunie de leurs gènes qui s’exprime dans notre orga- nisme. Chaque bactérie compte en général quelques milliers de gènes. La métagénomique, qui consiste en l’analyse globale des gènes d’un être vivant, a établi
que pour un humain de 23 000 gènes, le microbiote intestinal en concentre 500 000 millions.
Toutes ces recherches ont permis de reconsidérer le chiffre de 5000 espèces de bactéries connues comme totalement dérisoire, mais aussi de réaliser que 99 % des bactéries qui nous entourent sont inoffensives. Mieux, elles protègent le milieu dans lequel elles se sont installées, en occupant l’espace et en limitant ainsi la prolifération des « mauvais germes ». Les contours de cet univers immensément complexe à l’échelle de l’infiniment petit se dessinent encore.
L’INTESTIN, UN DEUXIÈME CERVEAU ?
Les bactéries sont partout en nous et autour de nous, mais on connaît surtout leur présence massive dans l’intestin... Il n’existe pas un stock défini de bacté- ries à peu près identiques chez tous les êtres humains comme on l’a longtemps cru. On supposait par exemple que la bactérie E. Coli était majoritaire dans l’intestin, alors qu'elle ne représenterait même pas 1 % de l’ensemble des organismes présents.
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