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CULTURE ET SOCIÉTÉ
LE POUVOIR DES FEMMES
Les manuscrits sur l’histoire de Mélusine connaissent une diffusion extraordinaire dès le XIVe siècle. Ils sont traduits dans plusieurs langues au point que la légende Mélusine intègre d’autres légendes nationales. C’est le cas en Tchéquie, par exemple, et au Luxembourg où elle est même assimilée à la mère des Luxembourg. Au XVIe et au XVIIe siècle, si Mélusine est peu à peu mise en retrait par les moralistes, diabolisée par l’Église, elle reste une icône populaire. Elle resurgit portée par le romantisme dès la fin du XVIIIe siècle et au XIXe siècle. De Goethe à Gérard de Nerval, en passant par Musset, Zola, et même Jean Lorrain qui, à la fin du siècle, lui consacre des poèmes.
La figure romantique de Mélusine oscille avec ambi- valence entre femme fatale et victime mélancolique, tentatrice et sacrifiée, libre et emprisonnée. Elle porte en elle toute la misogynie de cette époque.
Avec les surréalistes et surtout André Breton, le mythe de Mélusine se retourne. Dans Arcane 17, la fée res- suscite en martyre de l’aliénation patriarcale et le poète célèbre son pouvoir sur les forces de la nature. Entre le récit et l’essai, ce texte hybride est écrit en 1944 pendant un voyage au Québec, inspiré par sa muse, Elisa Claro. Il renvoie à l’arcane 17 du tarot de
Marseille, L’étoile, qui représente une femme nue age- nouillée avec deux cruches près d’une rivière, sym- bole de source de vie et arcane de Paix. Chez Breton, Mélusine, par son cri, porte l’espoir de la libération au moment où les alliés débarquent en Normandie. Redevenue serpente, elle est cette « femme-enfant » qui se réenfante dans son propre corps. Elle incarne la liberté absolue, le côté féminin de l’imagination créa- trice et de la poésie.
Mélusine, femme dragon, Sébastien Trouvé
Médaille Melusina, Musée national d'Histoire et d'Art, Luxembourg
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