Page 91 - Rebelle-Santé n° 202
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RENCONTRE
Lucie Servin
Un cyclo-nomade
en roue libre vers le bonheur
Cyclo-nomade, c’est ainsi que Jacques Sirat se	allaient dormir derrière le château. Un soir, j’ai suivi
présente. À 54 ans, il a tout quitté pour les
voyages et, depuis plus de vingt ans, il parcourt le monde à pied ou à vélo. Une vie d’aventures qu’il raconte dans ses récits de voyage et sur son site inter- net. Deux livres sont déjà parus, le premier publié en 2005, Cyclo-nomade, sept ans autour du monde, alors que le second Les rayons de la liberté, mon tour du monde à vélo* est sorti à l’automne dernier. Après un terrible accident, il ne pensait pas repartir et le voilà pourtant de nouveau sur les routes américaines. Un choix de vie qu’il nous confie.
R.-S. : Comment est né votre désir de voyager ?
Jacques Sirat : Gamin, j’avais la mappemonde accro- chée au mur de ma chambre. Je lisais Jules Verne, et je passais déjà de longs moments à repérer tous les endroits qui me faisaient rêver. J’étais loin d’imaginer que j’aurais l’occasion d’y aller un jour. J’ai grandi entre Saint-Antoine et Sainte-Mère dans le Gers, deux villages situés sur le chemin de Saint-Jacques-de- Compostelle. J’avais cinq ans quand ma mère est ve- nue s’installer à Sainte-Mère reprendre l’épicerie te- nue par ma grand-mère. Au magasin, je voyais défiler les clients de passage. J’étais surtout fasciné par ceux qu’on appelait à l’époque les trimeurs, qui venaient faire les saisons. Quand ils s’arrêtaient au village, ils
l’un d’eux. Caché derrière un buisson, je l’ai observé manger son saucisson et regarder les étoiles. J’étais enfant, et ça m’a fasciné. Cet inconnu serein et déten- du était à l’opposé des adultes toujours pressés que j’avais l’habitude de voir. Il a été déterminant dans ma vie. De même qu’au village il y avait aussi un terrain où stationnaient régulièrement des campements. Les gitans laissaient leurs enfants quelque temps dans mon école primaire. Quand ils repartaient, j’avais toujours envie de les suivre. Un rêve de gosse, encore une fois, que je n’aurais jamais pensé réaliser.
Quand avez-vous envisagé de partir ?
J’ai commencé des études de droit que j’ai vite arrê- tées pour passer des concours administratifs. J’ai at- terri à la poste de Garges-lès-Gonesse en région pari- sienne. Ce n’était vraiment pas une vocation. Au bout de quatre ans et demi, j’étais muté en Tarn-et-Garonne où je me suis mis à l’athlétisme et à la course à pied. Si j’avais été facteur, je ne serais peut-être jamais parti, mais je passais mes journées enfermé dans un bureau et ça devenait insupportable. À trente ans, j’ai décidé de changer de vie quand j’ai réalisé que j’aurais pu prédire mon emploi du temps pour les trente années à venir. L’angoisse de la routine m’a tellement effrayé que je suis parti en courant. Littéralement. Comme je
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Namibie : de Grünau au Fish River canyon


































































































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