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NUTRITHÉRAPIE
TOXICITÉ DE LA VITAMINE A : MYTHE OU RÉALITÉ ?
On multiplie les mises en garde au sujet de la toxicité de la vitamine A. Est-ce justifié ou a-t-on tendance à en faire un peu trop ? Revenons aux chiffres pour y voir un peu plus clair.
Les autorités sanitaires françaises ont fixé les apports recommandés en vitamine A à 750 mcg/j pour les hommes, soit environ 2500 UI/j, et à 650 mcg/j pour les femmes, soit environ 2150 UI/j. En mangeant deux œufs moyens par exemple, vous absorbez autour de 600 UI de rétinol.
L’apport maximal, quant à lui, est fixé à 3000 mcg/j, soit 10 000 UI/j. Des chiffres à com- prendre comme la quantité quotidienne de vita- mine A la plus élevée qu’on puisse consommer de façon continue sans risque probable de souf- frir d’effets indésirables.
Le seuil de toxicité, quant à lui, est encore plus élevé. Dans sa documentation technique, le laboratoire d’analyses médicales spécialisées Biomnis précise que l’intoxication chronique à la vitamine A correspond à une « prise pendant plusieurs mois de doses supérieures à 10 fois la dose recommandée ». En multipliant par dix les apports recommandés, on aboutit donc à des doses de 21 500 à 25 000 UI/j, suivant le sexe.
Bref, pour réussir le tour de force de s’intoxiquer à la vitamine A, il faudrait s’astreindre à consom- mer deux cuillerées à soupe d’huile de foie de morue par jour pendant plusieurs mois ! Aucune chance que cela n’arrive car je peux vous assu- rer que vous serez rapidement dégoûté par le produit – et je ne m’attarde pas sur les désagré- ments digestifs...
À signaler le cas particulier des femmes en- ceintes chez lesquelles la prise de vitamine A à des doses supérieures à la limite de sécurité – soit 10 000 UI/j – peut conduire à des malforma- tions congénitales.
SOURCES ALIMENTAIRES DE RÉTINOL ET BÊTA-CAROTÈNE
Rétinol : œuf, beurre, crème fraîche, fro- mages, viandes, volailles, abats, foie, poissons gras, huiles de foie de poissons...
Bêta-carotène : fruits (mangue, papaye, pam- plemousse, nectarine, abricot...) et légumes (ca- rotte, poivron rouge, patate douce, laitue, persil, épinard...).
pour pouvoir fonctionner correctement, point trop n’en faut, cependant, car vitamines A et D se fixent aux mêmes récepteurs cellulaires. Trop de vitamine A, et la vitamine D risque donc d’être partiellement
inhibée, avec des conséquences possiblement préju- diciables à la santé, notamment à la santé osseuse.
Un lien a ainsi été établi entre apports élevés en vita- mine A et diminution de la densité minérale osseuse, d’où une mise en garde adressée aux femmes méno- pausées, particulièrement concernées par le risque de perte osseuse. Il y a quelques années, une étude se fondant sur un échantillon de près de 6 500 personnes âgées de plus de 50 ans a conclu que la consom- mation de vitamine A aux niveaux habituellement recommandés n’a pas d’incidence négative sur la densité minérale osseuse aussi longtemps que le taux sérique de vitamine D ne descend pas en dessous de 20 ng/ml (2). Une donnée importante quand on sait qu’en France, quatre adultes sur dix ont justement un taux de vitamine D inférieur à 20 ng/ml ! Dans le doute, prenez donc systématiquement un peu de vitamine D dès lors que vous vous supplémentez en vitamine A, même modérément...
Didier Le Bail
Notes :
(1) Troesch et al, Dietary surveys indicate vitamins intakes below recommandations are common in representative western countries, Br J Nutr, 2012
(2) Joo N-M et al, Vitamin A intake, serum vitamin D and bone mineral density : analysis of the Korea National Health and Nutrition Examination Survey (KNHANES, 2008-2011), Nutrients, 2015
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