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Les disques et les DVD
présenter comme des militants écologistes, à éviter même des termes comme "développement durable" finalement très connoté. La neutralité est fondamen- tale pour ce type de projet car nous avons besoin de tout le monde. Chacun peut avoir ses opinions, l’im- portant c’est de fédérer autour d’une visée commune très simple : "Ne jetons plus dans les bennes, arrêtons le gâchis !". Tout le monde peut adhérer. » Une dé- monstration que la meilleure pédagogie de l’écologie passe peut-être d'abord par le bon sens. Jean-François Perard, lui, a travaillé pendant près de 20 ans à côté d’une déchetterie : « Parfois, c’est le contenu de mai- sons entières qu’on voit partir à la benne et même des magasins qui liquident des stocks neufs. » Au début de l’épidémie de Covid-19, c’est un petit stock de masques FFP2 et chirurgicaux, tout à fait valables, que la Recyclerie a sauvé de la benne et a pu apporter aux soignants quand ils en manquaient dans les premières semaines du confinement, en mars dernier.
LE DOMAINE DU POSSIBLE
De la détermination, de l’organisation : les synergies étaient là et une opportunité a suffi pour rendre ce rêve possible. En avril 2015, le benjamin de la bande, Florent De Wilde, repère un appel à projet autour de l’économie circulaire porté par la région Centre-Val de Loire et l’ADEME avec un dossier à rendre pour le mois de mai. Un premier défi relevé : le dossier bou- clé, les budgets ficelés, une convention est signée à l’automne, elle apporte 6000 euros de subvention. Jean-Paul Billault reprend : « Ils s’attendaient à ce qu’on utilise cet argent pour faire des études auprès de cabinets spécialisés mais nous savions que rien ne correspondait à notre modèle. Il fallait maintenant ex- périmenter, voir par nous-mêmes puisque nous avions déjà fait le tour des partenaires potentiels et obtenu le soutien des communes autour de nous. À l’été 2016,
nous avons signé notre premier partenariat avec le Sictom de Gien qui nous donnait accès à la déchette- rie de Sainte-Geneviève-des-Bois, tout près, où nous avons pu commencer à récupérer et à stocker dans un local prêté généreusement par cette mairie. Une des nôtres, Mélusine Harlé, avait par ailleurs suivi la fermeture du Maximarché de Châtillon-Coligny en février 2015. Nous avons donc proposé au proprié- taire, le groupe Schiever (Atac, bi1, Bricoman...), de nous mettre à disposition le local gratuitement pen- dant trois mois pour faire un test et ils ont accepté. Pour eux le projet était louable, et on leur offrait une porte de sortie valable pour abandonner les lieux. En revanche, nous ne savions pas trop comment la démarche serait accueillie par le public. Il y a eu des détracteurs, mais l’engouement a été progressif et continue, ce qui nous a encouragés à louer les locaux pour pérenniser l’expérience. »
UN MODÈLE INSPIRANT
Pas à pas, la Recyclerie s’est renforcée, structurée. Le soutien des gens a conforté son existence. Le virus, lui-même, ne semble pas avoir affecté son chiffre d’affaires même si le Festival des Insensés a dû être annulé. Les échanges fidélisent, le bouche-à-oreille a fait le reste. On parle d’une caverne d’Ali Baba, qui joue aussi le rôle d’une médiathèque, où certains achètent un bouquin ou un DVD pour en refaire don la semaine suivante et en racheter un autre. Bien sûr, tout ne s’est pas fait non plus d’un coup de baguette magique, mais l’équipe peut aujourd’hui envisager sereinement de nouveaux développements. Jean-Paul Billault précise : « Au début, on ne nous a pas for- cément pris au sérieux. Nous n’étions pourtant pas de doux utopistes et nous avions toutes les compé- tences pour monter ce type de projet. Mais le plus important pour nous, c’était d’assurer une viabilité
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