Page 6 - L'AVENTURE DE JABER
P. 6
L’AVENTURE DE JABER
NOTES POUR LA REPRÉSENTATION ET LA MISE EN SCÈNE
Je tente dans cette pièce une nouvelle expérience du théâtre politisant que j’avais déjà commencée. Il faut signaler ici qu’il y a une grande différence entre le théâtre politique et le théâtre politisant, distinction qu’il n’y a pas lieu d’étudier maintenant. Je précise rapidement le concept de ce théâtre en tant que dialogue entre deux espaces : le premier étant la représentation théâtrale qu’effectue un groupe voulant communiquer et dialoguer avec le public ; le deuxième, l’assistance elle-même qui reflète tous les phénomènes de la réalité et ses problèmes. Jusqu’à présent, ce dialogue s’avère toujours difficile car, il y a, d’une part, les traditions théâtrales fondées sur la suppression d’un tel dialogue ou sa mise en place d’une manière indirecte ou implicite et, d’autre part, - et c’est plus important - la nature des spectateurs eux-mêmes et leur refus profond d’entamer le dialogue et de donner libre cours à leurs désirs refoulés de s’exprimer. C’est pourquoi nous expérimentons quelques moyens artificiels pour présenter un modèle de la possibilité d’un tel dialogue en mettant par exemple, pendant la représentation, des spectateurs qui parlent pour leur propre compte et discutent, offrant ainsi un modèle de ce que pourrait faire le spectateur ou de ce qu’il devrait être. Certes, nous ne sommes pas naïfs au point de croire, comme l’a pensé un certain critique dans son commentaire sur la Veillée1 , que les vrais spectateurs ne sauront pas que ceux qui sont assis parmi eux et participent au débat et au dialogue sont des acteurs expérimentés. Mais, comme je l’ai déjà dit, nous essayons par quelques artifices de briser le cercle
1 Il s’agit de la Veillée à propos du 5 juin (titre arabe Ḥaflat samar min ajl khamsa ḥuzayrân), pièce que Wannous a écrite en 1967-1968 suite à la défaite du 5 juin 1967. Elle fut jouée pour la première fois à Damas le 2 mai 1971 et obtint un énorme succès.
5
