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Parallèlement à cette passion pour les sciences naissait un intérêt pour la peinture,
et notamment pour l’Ecole de Barbizon. L’anecdote du jeune Vuillefroy cherchant des
fougères ou des insectes, rencontrant par hasard des peintres peignant le motif dans la
forêt de Barbizon est souvent racontée non sans romance.
Mais le fait est qu’il fréquenta les artistes installés en forêt de Fontainebleau et notamment
Jean-François Millet (1814-1875) et Félix Ziem (1821-1911).
Vuillefroy décida alors d’abandonner le Conseil d’Etat en juin 1869, d’aller à
l’encontre de la volonté paternelle, et de devenir artiste peintre. Il était entré dans un
premier temps dans l’Académie Suisse puis dans l’atelier d’Ernest Hébert (1817-1908)
qui devait être rapidement confié à Léon Bonnat (1833-1922) en raison du départ
d’Hébert pour Rome. Félix de Vuillefroy exposa pour la première fois au Salon en 1867,
ce fut le début d’une longue carrière officielle qui ne prendra fin qu’en 1913, date de son
dernier Salon.
Il devient alors un peintre animalier, ses toiles sont essentiellement consacrées au
motif de la vache. Bien qu’il ait peint d’autres sujets, cette thématique fut très importante
et prend tout son sens dans le contexte politique de la Troisième République. En effet, la
jeune république, soucieuse de stabilité, encouragea cette peinture « du terroir », exaltant
le sentiment de cohésion nationale et de pérennité. La période 1870-1890 fut alors le
moment d’épanouissement d’une peinture consacrée aux Bovins où les acteurs les plus
connus aux côtés de Vuillefroy furent Rosa Bonheur (1822-1899), Emile van Marcke
(1827-1890) ou encore Léon Barillot (1844-1929).
Le Salon de 1870 fut l’occasion pour Vuillefroy d’une première médaille ainsi que
d’un premier achat par l’Etat de son tableau « Le matin dans le Bas-Bréau ». Par la suite
l’Etat lui achètera d’autres toiles aux Salons de 1879 et de 1880 notamment. Sa longue
carrière sera marquée par son implication dans l’organisation du Salon, en devenant
secrétaire de la Société des Artistes Français en 1881 et aussi membre du jury de la section
Peinture. L’année 1880 fut aussi pour lui celle de sa nomination en tant que chevalier de
la Légion d’Honneur.
Le rôle de Vuillefroy dans le jury de peinture du Salon des Artistes Français de
1881 se trouve illustré par l’obtention pour Edouard Manet (1832-1883) d’une médaille
de seconde classe. En effet, en 1881 Henri Gervex (1852-1929) avait fait campagne
auprès de ses confrères pour que Manet soit récompensé au Salon, le peintre y présente
deux toiles dont le « Portrait de Perthuiset, le chasseur de lions ». La médaille de seconde
classe avait été obtenue grâce à un total de dix-sept voix sur trente-trois, parmi ces dix-
sept voix en faveur de Manet figure celle de Vuillefroy. Il reste cependant difficile, en
l’absence de documents, de comprendre le regard que portait Vuillefroy sur l’œuvre de
Manet. Le fait qu’en 1890 Félix de Vuillefroy fut l’un des quatre-vingt-quinze donateurs
pour offrir « l’Olympia » de Manet à l’Etat est un élément intéressant concernant ses
opinions artistiques, de même de son amitié avec Antoine Guillemet (1843-1918), proche
de Manet.
A partir de la fin des années 1890 la santé de Félix de Vuillefroy se dégrade et son
implication dans la vie artistique du moment diminue, absent du Salon entre 1899 et 1910