Page 43 - IHEDATE - L'annuel 2017
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Les territoires et le monde
SOPHIA BOUFERROU, LOUIS CAILLEAU, ELENA MEJIAS, ANAËLLE SUBERBIE
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POUR UNE APPROCHE CRITIQUE
du modèle de développement de la région tangéroise
Ce n’est qu’au tournant du e
La ville de Tanger se trouve en effet sur l’un des couloirs maritimes les plus fréquentés de la planète. Celui-ci voit passer chaque année près de 100 000 navires , représentant 20 % du commerce mondial et 5 millions de passagers. Les pouvoirs publics marocains semblent avoir pris la mesure du potentiel économique qu’apporte cette situation géographique au carrefour de quatre ensembles mondiaux, l’Afrique, l’Europe, l’Atlantique et la Méditerranée.
Tanger Med, un capteur des  ux mondiaux
Le projet pharaonique de Tanger Med, qui constitue l’un des plus importants hubs de transborde- ment en Atlantique et Méditerra- née, et la création de plusieurs zones franches répondent direc- tement à l’objectif de capter les  ux mondiaux et de faire de la capitale régionale la porte d’entrée des investisseurs en Afrique.
Le développement industrialo- portuaire s’accompagne du projet ambitieux de « Tanger Métropole », lancé en 2013, pour attirer des investisseurs internationaux. Cela se traduit par l’aménagement de quartiers d’affaires, de sites touristiques et commerciaux,
d’infrastructures métropolitaines parmi lesquelles une ligne ferro- viaire à grande vitesse reliant Tanger à Rabat. Cette stratégie de « modernisation » vise le désencla- vement et le développement écono- mique de la région Nord.
Pour réaliser de nouvelles infrastructures, le Maroc a besoin de l’engagement de  nancements extérieurs. Pour ce faire, l’un des arguments mis en avant, outre celui du faible coût de la main-d’œuvre et des dispositifs  scaux très avantageux, est la stabilité politique. Les cibles de ce discours sont diverses : entreprises européennes, fonds souverains des pays du Golfe , et plus récemment entreprises chinoises. Le 20 mars 2017, le Roi Mohammed VI a signé un protocole d’accord avec un groupe d’inves- tisseurs chinois pour la création d’une ville nouvelle s’étendant sur 2000 hectares au sud de Tanger.
Mais les besoins de  nancements poussent à l’élaboration de projets directement influencés par les intérêts des acteurs internationaux et à l’application de modèles de développement standardisés. Ainsi, la concession est le contrat majori- tairement utilisé pour déléguer la gestion des nouvelles infrastruc- tures. Ce mécanisme place le
XXI siècle que la région Nord devient stratégique pour le développement du Maroc. Mohammed VI souhaite, à travers la signature d’accords de libre- échange, une accélération de la modernisation et de l’ouverture internationale du pays. Après l’entrée du Maroc à l’OMC en 1994 (Charte de Marrakech), l’accord européen de libre échange avec le Maroc entre en vigueur en 2000. C’est dans ce contexte que Tanger, via le port de Tanger Med, devient le premier site de transbordement du pays.
N. Mareï, 2012, « Le détroit de Gibraltar dans la mondialisation des transports maritimes », EchoGéo, n° 19.
Les zones franches gérées par la TMSA s’étendent sur un territoire de 5000 hectares, comprenant près de 750 entreprises et environ 65 000 emplois, principalement tournés vers les secteurs logistiques, aéronautiques, automobiles, électroniques et textiles.
K. Fatimi, 2015 , « Les pays émergents : nouvelle destination des fonds souverains », Géoéconomie, vol. 74, no 2, pp. 97-114.


































































































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