Page 45 - IHEDATE l'annuel 2015
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Des entreprises et des territoires
Bernard Pecqueur
I45 ou l’art du bon sens territorial
D’où vient votre intérêt
pour l’économie locale ?
Tout a commencé en 1981 quand les socialistes on été élus par centaines. Il a fallu leur trouver des collaborateurs. J’étais jeune diplômé en sciences politiques et j’ai été embauché comme assistant parlementaire. En 1982 et 1983 sont arrivées les lois de décentralisation. C’est aussi l’époque des politiques de rigueur et de la désindustrialisation dans les campagnes. Je me suis occupé notamment des papeteries en Isère. Elles tombaient comme des mouches. Donc je me suis dit que les problèmes de développement, c’était sur le territoire que cela se passait. Par la suite, j’ai été adjoint au maire à Grenoble, en charge des relations avec les entreprises et les nouvelles technologies.
Comment pourriez-vous qualifier les relations entre les entreprises et les territoires ?
Les relations entre les entreprises et les terri- toires, c’est l’histoire d’un vaste malentendu. Nous nous sommes enfoncés dans une crise à partir de 1982, les politiques publiques locales ont pris alors le relais d’un Etat un peu chancelant dans le cadre des lois de décentralisation. Mais aujourd’hui, ce sont les politiques locales qui sont en panne non seulement de moyens financiers mais aussi en panne de sens.
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Comment définiriez-vous cette crise ?
Les collectivités sont un peu perdues, elles ne savent plus ce qu’elles doivent faire et elles n’ont plus beaucoup de sous. Les dotations diminuent et l’action économique des collectivités locales est impactée directement par ces problèmes budgétaires. Et notamment l’investissement public local qui représente près des trois quarts de l’investissement public total.
Du coup, on a tendance à penser que les collectivités ont surtout un problème d’argent. Et cette idée est relayée et renforcée par les médias. Je pense que le problème d’argent est secondaire. Plus profondément, il y a un problème de sens. Cela a commencé en 1982 avec des lois de décentralisation. On a lancé une injonction très forte aux maires et aux élus des collectivités territoriales : «L’emploi, c’est vous !» Les élus n’étaient pas préparés à accueillir cette injonction, ils n’avaient pas les compétences. Il s’est alors enclenché une névrose par rapport à la création d’emplois.


































































































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