Page 60 - IHEDATE l'annuel 2015
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Quel regard portez-vous sur l’afflux migratoire massif et sans précédent que connaît l’Allemagne en 2015 ?
Cet afflux massif de réfugiés est en train de provoquer un schisme entre «nouveaux» et «anciens» migrants. La population turque se sent notamment menacée. Cette tension risque d'être croissante dans les zones où les risques de précarisation sont les plus élevés, surtout dans les régions de l'Est de l'Allemagne.
Comme le souligne Gilles Duhem, nous retrou- vons cette fracture entre l'Ouest et l'Est entre des Allemands qui alertent sur «le bateau est plein» (mouvement PEGIDA, mouvement de protestation contre l’islamisation de l’Occi- dent) et d'autres qui réclament « l'abolition des frontières pour tous » (marche des réfugiés sur Berlin en 2014). Les réfugiés, nouvelle « tête de turc» pour reprendre le titre du livre célèbre de Günter Wallraff, sont les populations les plus défavorisées. Alors que les musulmans sont très peu nombreux dans les territoires de l'ex RDA, c'est pourtant à Rostock en 1991 et dans le Brandebourg en 2015 qu'ont eu lieu des attaques.
Plusieurs spécificités historiques distinguent l'Allemagne de la France : c'est un pays d'émigration et l'histoire industrielle allemande jusqu'à celle du miracle économique est indissociable de son histoire démographique. Un atout, d'ordre social et spatial : du fait des destructions de la guerre, le logement social s'est construit en cœur de ville et rarement à la périphérie, d'où une ségrégation sociale et spatiale beaucoup moins forte qu'en France. Enfin, une composante clé de l'identité culturelle allemande : la Shoah a fait du travail de mémoire un devoir au quotidien. Gilles Duhem explique à ce sujet que « le fait d’avoir un génocide motivé religieusement dans son histoire change fondamentalement
le rapport collectif de la société entière à un nouvel acteur religieux comme l’ islam. [...] L’Allemagne n’est pas la fille aînée de l’église et a dû trouver depuis Luther de nombreux compro- mis religieux ». Mais l'intégration de nouvelles populations avec des cadres culturels et moraux très éloignés de ceux de la société occidentale est un défi d'une nouvelle ampleur. Il va demander de vaincre beaucoup de peurs de part et d'autre et d'inventer de nouvelles forces de régulation. L'industrie jouera notamment un rôle d'intégrateur de premier plan, de même que l'apprentissage.
BERLIN, CAPITALE INDUSTRIELLE,
Dorothée Kohler in Damette Felix et al., ministère de l’Équipement et des Transports, 1995.
PARIS-BERLIN, REGARDS CROISÉS,
Gilles Duhem, Boris Grésillon, Dorothée Kohler, Economica, 2000.
POUR UN NOUVEAU REGARD
SUR LE MITTELSTAND,
Dorothée Kohler et Jean-Daniel Weisz, La Documentation française, 2012.
INDUSTRIE 4.0 : QUELLES STRATÉGIES NUMÉRIQUES ?
La numérisation de l’industrie
dans les entreprises du Mittelstand allemand, Dorothée Kohler
et Jean-Daniel Weisz, Bpifrance, 2015.
ANATOMIE DES «MODÈLES» INDUSTRIELS,
Dorothée Kohler in Pierre Veltz et Thierry Weil (dir.), L’industrie, notre avenir, Eyrolles, 2015.
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Pour aller plus loin


































































































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