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Politiques & institutions
sonnalité ou de sa réussite sociale. Ce ne sont pas tant les attributs du véhicule qui sont mises en avant dans les publicités, mais les bénéfices qu’il apporte. Du « plaisir de conduire » (bMW) au « pouvoir des rêves » (Honda), ou à « la vie, avec passion » (renault), tout a été fait « pour que l’automobile soit toujours un plaisir » (Peugeot). Pourtant, le modèle traditionnel de la possession de sa voiture semble avoir atteint un pic, et son industrie se prépare à entrer de plain-pied dans l’ère de l’économie collaborative. À en croire les pros- pectivistes, blablacar n’en repré- senterait que les prémices, et les modèles économiques de ces so- ciétés parfois centenaires se pré- parent à être bouleversés. Les ré- centes alliances entre constructeurs automobiles, géants du numériques et acteurs de la mobilité illustrent ce qui semble nous attendre.
Le digital permet d’entrevoir une vraie intermodalité
Le foisonnement des nouvelles solutions de mobilité semble consti- tuer une réponse pertinente à la diversité des attentes des voya- geurs. Mais, dès lors qu’à l’exception des très courtes distances, aucune d’elles ne peut prétendre à da- vantage de souplesse que la voi- ture, elles n’auront de pertinence que si elles sont à même de par- faitement se compléter et s’intégrer dans le cadre d’une solution glo- bale. C’est la promesse du MaaS (Mobility as a Platform) permise par l’avènement du digital et dont on parle tant aujourd’hui. Elle consiste à informer, vendre et gui- der via une application smartphone unique l’ensemble des possibilités de déplacement qui s’offrent à ses utilisateurs, tous modes et tous opérateurs confondus, du bus au covoiturage en passant par la trot- tinette en libre-service et au taxi. Elle va ainsi bien au-delà des cal-
culateurs d’itinéraires que l’on connaît, le plus souvent limités aux transports publics.
Le MaaS mise sur :
- la simplicité d’usage (regarder mon smartphone est aussi facile que de prendre mes clefs de voi- ture), y compris pour des dépla- cements qui impliquent d’enchaîner plusieurs modes de transport ( je suis guidé) ;
- l’attractivité du dispositif par la diversité des modes mis à dispo- sition et l’absence des contraintes liées à la possession d’une auto- mobile (de son financement à la recherche d’une place de station- nement) ;
- son caractère permanent (au moins une solution doit pouvoir m’être proposée dans les minutes à venir pour pouvoir effectuer mon déplacement) ;
- l’atteinte d’une « masse critique » d’utilisateurs permettant de rendre
Le modèle traditionnel
de la possession de sa voiture semble avoir atteint un pic (...).
économiquement viable le dispositif d’une part et d’en faire une norme sociale d’autre part (tout le monde l’utilise, je fais donc comme tout le monde en l’utilisant moi aussi). S’y convertir nécessitera néanmoins de profonds changements culturels, sans doute de la part des voya- geurs que nous sommes tous, mais aussi et surtout des décideurs. La frontière entre public et privé devient quasi-vide de sens pour l’utilisateur, ne compte plus que la facilité d’usage et le caractère fluide de déplacements compre- nant pourtant des ruptures de charge. Y parvenir nécessitera une modification de la gouvernance, une capacité à jouer collectif aux fins d’atteindre ce seul objectif : limiter les impacts négatifs de nos déplacements. z
ERWAN TERRILLON CONSULTANT EN MARKETING DES TRANSPORTS ET DE LA MOBILITÉ
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