Page 10 - MOBILITES MAGAZINE N°23
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   SAINTE-FOY-LA-GRANDE, UNE PETITE VILLE OUBLIÉE PARMI TANT D’AUTRES...
l’exemple de sainte-Foy-la-grande, située à l’extrême extrémité orientale de la gironde(1), résume un type de situation très fréquent dans la France périphérique. Celui d’une petite ville, auparavant prospère grâce à la viticulture et au commerce, et qui s’est progressivement paupérisée et en en partie dépeuplée. son centre historique remarquable, très densément construit, a été progressivement déserté par des classes moyennes, attirées par l’appel de la maison individuelle. et il a été en partie repeuplé par des familles modestes poussées par la pression immobilière à se loger au loin de bordeaux. alors qu’en même temps, une grande partie des activités économiques et commerciales subsistantes localement se sont transférées dans une périphérie mitée par les commerces « en boîtes » et ponctuée de ronds-points.
Côté transports, la ville paie sa situation de quasi-enclavement dans la Dordogne voisine, qui l’écarte de la desserte des autocars départe- mentaux du réseau transgironde. en revanche, la ligne teR (bordeaux) libourne-bergerac-sarlat dessert la ville située à 38 km de libourne et à 74 km de bordeaux. Une ligne à voie unique non électrifiée, qui affiche pourtant une offre de trafic non négligeable, avec pas moins de 14 trains allers-retours quotidiens, alors que les 160 000 voyageurs annuels en gare de sainte-Foy-la grande, totalisent plus de 15% des 900 000 voyageurs de la ligne. il faudra attendre septembre 2019 pour achever sa profonde modernisation(2), au prix d’une fermeture d’une durée de neuf mois, durant laquelle les trains seront remplacés par des navettes d’autocars jusqu’à libourne, en correspondance avec des trains en provenance et en direction de bordeaux.
« Si la distance en temps de transport pour accéder aux commerces, aux diverses administrations et services peut sembler plutôt raisonnable, c’est oublier que l’espace de mobilité imaginable pour ceux qui ne disposent pas de voiture se trouve singulièrement réduit ».
Une situation d’autant plus difficile que faute d’infrastructures de transport public suburbains à la hauteur des ambitions bordelaises, « la richesse de Bordeaux Métropole ne ruisselle pas à plus de vingt kilomètres, elle s’arrête à Libourne ». MC
1) Marc Sahraoui, Les territoires ruraux ont besoin des métropoles, in°« Le Monde »,
28 décembre 2018, p. 18. L’auteur est l’administrateur de « Cœur de Bastide », l’association de développement économique locale. Les citations du texte sont toutes issues de son article.
2) Le projet, d’un montant de 83,8 M€, est inclus dans le CPER Aquitaine 2016-2020.
De Libourne à Bergerac, il consiste à renouveler 62 km de voie (dont 7 km dans cinq gares) et 120 000 traverses, remplacer 10 aiguillages, rénover les ouvrages d’art (dont un pont
à reconstruire) et à sécuriser 72 passages à niveau. L’objectif principal vise à retrouver
une vitesse maximale de 120 km/h sur toute la ligne. La section Bergerac-Sarlat, bien plus dégradée, avait été rénovée en 2012.
vide » (!) opposerait métropoles mondialisées et territoires oubliés. L’effet d’une coupure à la fois sociale et géographique qui s’étendrait des marges périurbaines les plus fragiles aux espaces ruraux en passant par des villes, petites et moyennes. Selon cette analyse théorisée et développée par Christophe Guilluy, il s’agirait d’une relégation, d’une véritable « assignation à résidence » de couches moyennes et popu- laires, qui totalisent pourtant la majorité de la population (employés, ouvriers, petits indépendants, etc.), et qui se trouve en partie parquée dans une vaste France périphé- rique(1).
Une catégorisation qui associe l’ana- lyse sociologique, celle des niveaux de vie, des taux de chômage et de précarisation, comme celle de la valeur de l’immobilier. elle aboutit à mettre en avant une répartition singulière d’une grande partie des catégories sociales modestes et moyennes dans l’espace national. Avec une forte densité de leur re- présentation dans un ensemble de territoires mi ruraux-mi urbains qui auraient comme point commun de se trouver situés à l’écart, voire hors d’atteinte, des zones d’attrac- tion des métropoles les plus im- portantes. et donc le plus souvent aussi à l’écart de grandes infra-
De l’avion au TGV, la mobilité choisie reste le privilège des classes supérieures (...) la mobilité, le monde nomade, c’est d’abord celui des gagnants de la mondialisation.
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