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Technologies & innovations
des effets très positifs sur la com- bustion dans le moteur : préser- vation des organes sensibles (in- jecteurs, vannes EGR, catalyseurs) et réduction des émissions d'hy- drocarbures imbrûlés. Les gazoles de synthèse à bases d'huiles vé- gétales hydrogénées, ou HVO, commencent à être produits en France, Total prévoyant une unité de production de ce produit à la raffinerie de La Mède (Bouches- du-Rhône). Seul obstacle : comme pour le bio-éthanol en son temps, l'administration des Douanes fran- çaises est en net retard sur les in- dustriels. Et le HVO n'est pas re- connu comme carburant par l'Ad- ministration fiscale.
La Loi de transition énergétique : alpha et oméga des carburants ?
La loi de transition énergétique pour la croissance verte votée le 18 août 2015, et complétée par les décrets d'application définissant les véhicules à basses émissions et la programmation pluriannuelle de l'énergie en 2016, constitue le cadre législatif et administratif conditionnant l'avenir en France de ces carburants non pétroliers. Le principe : la loi de 2015 pose comme objectif d'avoir en 2030 au moins 15% de carburants re- nouvelables dans le mix énergé- tique des transports. Selon l'IFP- Energies Nouvelles, « cet objectif serait réalisable avec un mix éner- gétique comprenant des biocar- burants liquides de première et seconde générations jusqu'à un potentiel de 14% complétés d'une part d'électricité renouvelable et de biométhane ». Le décret relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie pose comme objectif 1% du Pouvoir Calorifique Inférieur consommé en gazole « bio- sourcé » en 2018, et 2,3% de ce PCI en 2023.
Le moteur diesel est-il condamné ? 42 - MOBILITÉS MAGAZINE 05 - JUIN 2017
Une pure rationalité, et les ré- ponses des constructeurs moto- ristes, inciteraient à répondre par la négative. Mais en matière poli- tique, sommes-nous encore dans la rationalité ? En effet, le moteur diesel Euro VI, est seulement re- connu de plein droit pour les liai- sons interurbaines. Pour les péri- mètres de transports urbains, les acquisitions de moteurs diesel sont autorisées à partir de 2020 pour les seules communes et agglo- mérations non soumises aux Plans de Protection de l'Atmosphère. Pour les agglomérations de moins de 250 000 habitants, soumises à un Plan de Protection de l'Atmo- sphère, tout dépend de l'existence d'un arrêté préfectoral imposant l'usage des véhicules des groupes 1 et 2 (véhicules dits à « faibles émissions »). Au-delà de ce seuil de 250 000 habitants, seuls les véhicules des groupes 1 et 2 (voire groupe 1 pour certaines communes faisant l'objet d'un arrêté préfec- toral) sont admis.
Prouver ses origines renouvelables
Notons qu'il existe une ambiguïté dans le décret n°2017-23 du 11 janvier 2017 relative aux véhicules du groupe 2. Il dispose en effet qu'appartiennent à celui-ci « les
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La loi de 2015 pose comme objectif d'avoir en 2030 au moins 15% de carburants renouvelables dans le mix énergétique des transports.
véhicules dont la motorisation est électrique-hybride, ou utilise un carburant gazeux ou les véhicules dont les moteurs sont conçus pour ne fonctionner qu'avec des car- burants très majoritairement d'ori- gine renouvelable ». Dès lors, un parc roulant aux carburants B100 ou HVO serait compatible avec la Loi sur l'air et ses décrets d'appli- cation. Tout l'enjeu est alors de prouver l'origine renouvelable de ces carburants via le fournisseur. Du côté des motoristes, tous les constructeurs ont homologué sans modifications techniques ni res- trictions de garanties contractuelles, le carburant HVO pour leurs auto- cars et autobus à motorisations Euro VI. Autre avantage du HVO : il ne pénalise pas les performances (puissance, couple et consomma- tion spécifique). La situation des bio-gazoles B30 et B100 est plus contrastée. Ainsi MAN et Volvo autorisent-ils ces carburants bio- sourcés moyennant un dispositif de filtration renforcé (à demander en option départ usine) et des in- tervalles de maintenance réduits. A l'opposé, Mercedes-Benz ou Iveco Bus refusent les B30 et B100 en Euro VI. Attention aussi avec les chauffages additionnels (Ebers- pächer ou Webasto) : ils ne sont pas prévus pour fonctionner avec ces gazoles de synthèse ou bio- gazoles !
Aux vues de l’ensemble de ces éléments, comment ne pas re- gretter que dans l'opinion publique, le moteur diesel soit banni, alors même qu'il peut fonctionner avec des carburants non-pétroliers.z
JEAN-PHILIPPE PASTRE
(1) Panorama IFP-EN 2016 : le point sur... état des lieux des perspectives des biocarburants.
(2) Le programme BioTFuel associe le Commissariat à l'Energie Atomique, l'Agence de Développement de la Maîtrise de l'Energie, l'Institut Français du Pétrole et des Energies Nouvelles, ainsi que les sociétés Axens, Avril ThyssenKrupp Industrial Solutions AG et Total.