Page 14 - Voyages & Groupe n°33
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Toutes les chaînes prennent en ce mo- ment les mêmes mesures : masques pour le personnel comme la clientèle, prise de température, désinfection sys- tématique du bâtiment, réutilisation des chambres 24 h après le départ du client ; ce sont des mesures purement sanitaires. Si les établissements ne se penchent pas en outre sur la distancia- tion sociale, le public risque de s’orienter vers ceux qui tiendront compte de ce paramètre. Mais il est clair que, pour les hôtels, cela exige une logistique plus lourde qui risque de se reporter sur le tarif pour des clients.
VG : Selon vous, les hôtels à venir seraient donc peut-être moins oné- reux pour le client ?
J-MG : Probablement. Car l’hôtel à dis- tanciation sociale serait, dans sa concep- tion même, différent, avec de plus grandes chambres, et moins de parties communes. Ainsi, l’Isan Golf & Adventure Hotel, par exemple, a rapidement changé ses plans ; la surface initiale du restaurant a été drastiquement diminuée au profit de celles des terrasses de chaque bun- galow. Ainsi les repas ne seront plus servis en commun sous forme de buffet, mais systématiquement sous forme de room service. Si le client a le choix, il est évident qu’il s’orientera vers les structures qui proposeront
Goulding’s Lodge à Monument Valley
le client loisirs qui risque de se reporter sur des destinations comme le bush australien, les grands espaces améri- cains ou les Alpes. C’est une révolution qui s’opère. C’est du darwinisme. À mon sens, ce n’est pas forcément les plus puissants qui vont s’en sortir, mais ceux qui sauront s’adapter. De ce fait, c’est peut-être une chance justement pour les plus petits établissements qui vont réussir à tirer leur épingle du jeu, car plus souples en termes d’adaptation.
VG : Ne croyez-vous pas que les gens vont finir par oublier, d’ici quelques mois et retourner dans ces grands hôtels ?
J-MG : Je suis de nature optimiste et le voyage fait partie de notre ADN. C’est
à prix a peu près équivalent, avec des hôtels à distanciation sociale, à long terme, le public va continuer dans cette direction. Cette période va nous faire prendre conscience qu’il y a d’autres façons de voyager en se fiant à des labels comme celui dont je m’occupe.
VG : Quel est-il ?
J-MG : Une de mes clientes vient de déposer un label pour toute l’Europe - le nom de domaine est enregistré - Social Distancing Hotels. L’idée étant de créer une organisation qui va gérer ce label. C’est un peu comme ceux liés à l’écotourisme.
Et, finalement, les deux sont liés. Les critères sont encore à l’étude que ce soit pour des hôtels déjà ouverts ou à
une plus grande sécurité en matière de distanciation sociale.
« Ce n’est pas forcément les plus puissants qui vont s’en sortir, mais ceux qui sauront s’adapter »
venir. Chaque partie de l’hôtel aura ses critères, de la chambre au restau- rant en passant par les spas. Si un établissement est déjà situé dans une
VG : Une solution vala-
ble dans des zones encore peu tou- ristiques, mais quid des endroits plus urbanisés, à la densité de po- pulation élevée ou déjà victime de surtourisme ?
J-MG : Ce n’est plus viable en effet. Si le client d’affaires n’a pas le choix de la destination, il en va tout autrement pour
pour cela qu’on ne vit plus dans des grottes à côtoyer des chauves-souris ! L’homme a cette curiosité qui le pousse à aller ailleurs. Les voyages vont re- prendre, mais en s’adaptant. Je le répète, les options sont nombreuses, et si on a le choix entre une destination bondée ou un endroit plus vaste ou plus isolé,
zone éloignée des centres urbains et touristiques, il aura déjà rempli un critère. Celui de cœur de ville devra se rattraper sur d’autres et tous seront ins- pectés. Le but ? Que ce label devienne incontournable et à terme dans le monde entier. z
Propos recueillis par Pascale Missoud
14 - Voyages & groupe 33 - MAi 2020
L’interview