Page 24 - Black Beautés Magazine - 2025
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LE WAX, ENTRE MÉMOIRE
ET MODERNITÉ :
UNE EXPOSITION INCONTOURNABLE
AU MUSÉE DE L’HOMME
Du 5 février au 7 septembre 2025, le Musée de l’Homme, à Paris,
consacre une exposition majeure au wax, ce tissu de coton aux
couleurs éclatantes et aux motifs chargés de sens, devenu un
emblème vestimentaire et identitaire de l’Afrique de l’Ouest.
Intitulée tout simplement "WAX", l’exposition s’inscrit dans la
saison thématique du musée dédiée aux migrations. Une
invitation à plonger dans les racines, les voyages et les
réappropriations culturelles d’un textile pas comme les autres.
Un tissu voyageur aux origines hybrides
Le wax, qu’on associe spontanément au continent africain, ne
naît pourtant pas en Afrique. Il voit le jour au XIXe siècle dans les
ateliers des industriels néerlandais qui tentent d’imiter les batiks
traditionnels indonésiens. Destinées à l’origine au marché
asiatique, ces étoffes cirées ne rencontrent pas le succès
escompté. Mais leur destin bascule grâce aux soldats ghanéens
enrôlés par les Néerlandais à Java. De retour sur la Côte-de-l’Or,
ces derniers rapportent avec eux des échantillons de wax, qui
séduisent immédiatement les populations locales. C’est le début
d’un formidable engouement pour ce tissu désormais réorienté
vers les marchés africains par les fabricants européens,
notamment la firme néerlandaise Vlisco.
L’exposition retrace avec précision cette histoire méconnue, de
la domination des manufactures européennes au développement
progressif de productions locales à partir du milieu du XXe siècle,
notamment au Nigeria, au Bénin ou au Burkina Faso. Une partie
de l’exposition est notamment consacrée à Uniwax, la célèbre
filiale ivoirienne de Vlisco, ainsi qu’au rôle central joué par les
“Nana Benz”, commerçantes togolaises influentes qui ont fait du
wax une affaire de femmes et de pouvoir.
Un langage visuel et social
Au-delà de son esthétique, le wax est un véritable langage. Les
motifs imprimés sur le tissu œil, robinet, fleur d’hibiscus, sac de
Michelle Obama ou encore “Tu sors, je sors” ne sont jamais
anodins. Ils sont souvent porteurs de messages codés, parfois
ironiques, souvent puissants, que ce soit pour exprimer une
émotion, une opinion, ou marquer une appartenance sociale,
politique ou communautaire. L’exposition met en lumière cette
richesse iconographique, nourrie par les faits d’actualité, les
récits intimes ou les grands bouleversements sociaux.
Ce tissu populaire, porteur de sens, se décline aussi selon
plusieurs gammes de qualité, du fancy bon marché au superwax
plus luxueux. En filigrane, se dessine également la complexité
d’un marché mondialisé, avec ses enjeux de concurrence entre
fabricants africains, européens et asiatiques.