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c u l t u r e                                                                                    c u l t u r e



 au lodge de Jarkhot, le repas partagé, la   manœuvres, le passage est dégagé.   lui donne de violents coups de pieds.         style architectural local : un petit coin
 voie lactée qui tapisse le ciel étoilé sont    L’enfant est en sang. Elle ne semble         de paradis.
 des instants d’éternité.   Nous croisons quelques troupeaux de   pas comprendre que quelqu’un puisse   Cathy a chuté plusieurs fois pendant le
 moutons avant d’arriver à Kagbepi, dans   intervenir : c‘est son fils. Cette femme         périple. Il était en effet plus facile pour
 Jour 10   un « Yak Donald » où après l’épisode de   est elle-même couverte de cicatrices         nous de rétablir notre assise grâce à nos
 Nous remontons vers le temple visité   la bête dépecée, nous déjeunons d’un   au visage. Nous nous arrêtons devant   jambes. Elle est remontée sur sa monture,
 la veille et obliquons vers la vallée de la   hamburger de yak. Une soudure de   une cascade majestueuse : l’eau est         sans en rajouter, avec une détermination
 Cali Gandaki pour emprunter une piste   cale pied, un coup de clé anglaise plus   vivifiante ! Sur la piste, les nuages de         qui force notre admiration.
 vertigineuse. Les lacets s’entrecroisent   tard, nous cheminons sur une route   sable fin soulevés par le vent ajoutent de
 et  se  succèdent,  le  parcours  est   ventée, soulevant des volutes qui se   la difficulté et quelques chutes et bobos         Jour 14
 caillouteux. Quelques plaques de glace   transforment en nuages de sable fin   supplémentaires en résultent.         Après cette nuit en pleine nature, il est
 nous incitent à redoubler de vigilance.   comme du talc appelé fesh fesh. Nous         malheureusement temps de reprendre
 Les descentes sont piégeuses car des   avons donc entamé le voyage retour   De retour au lodge de Tatopani, après   la route, nous serions  bien volontiers
 amas de galets sont empilés les uns sur   quand nous parvenons au lodge high           restés un jour de plus. Le long de la
 les autres. La vue est impressionnante,   pain hill. Les images, les odeurs et les         motor way, des vendeurs ambulants
 nous nous arrêtons au sommet d’un   sourires népalais tournent autour de      proposent   leurs   marchandises :
               au bord d’un lac. Une musique népalaise   Dominique M. dont la segmentation
 aplomb pour contempler les cimes.   nos yeux quand nous nous endormons.         poissons du fleuve  en contrebas,
               envoutante traverse les berges, nous   est à bout; crache, à la fin du parcours,
 Le ciel, d’un bleu limpide souligne                                           fruits et légumes. La circulation reste
 encore mieux ce moment. Un groupe  Jour 11   sombrons dans le sommeil.   une fumée bleue malodorante, qui n’   extrêmement dangereuse. Pierry  nous
 d’humains rencontre, en toute humilité,   Un  concerto  improvisé  pour  trois   Jour 13   encourage personne à rester longtemps   a, à chacun, recommandé de ne pas
 une nature surpuissante qui a façonné   harmonicas donne le départ de cette   Au matin, les brumes du lac se lèvent en   derrière lui.   relâcher notre vigilance pour ce dernier
 cet environnement.   étape. Les deux enfants à qui j’ai fait signe   même temps que nous. Nous préparons   Notre lodge suivant est difficile à trouver,   jour de conduite. Plusieurs d’entre
    de venir éclatent de rire.                 le point GPS apparaît finalement et il   nous passent de justesse  l’examen du
               notre équipement pour une longue   nous faut traverser un pont de singe
                                                                               dépassement. Côté visibilité, il faut
               étape. Nous pensions que le début                                 circuler dans la poussière qui colle
               du cheminement serait tranquille.
               Pierry, avec un petit sourire en coin,                            et les fumées noires des camions et
                                                                                 des bus. Traverser Katmandou est
               nous a concocté un itinéraire de                                  une  aventure supplémentaire.  Nous
               montagne où sont concentrées toutes
                                                                                 arrivons à l’hôtel Kantipur qui est
               les difficultés : pierres, terre, terrain                         un ancien temple, notre destination
               gras. Pas de bobos, malgré quelques                               finale.
    nos bains d’eau chaude, la soirée est plus   décrochages.  Nous  croisons  des      Nous  abandonnons  à  regret  nos
   que joyeuse, quelques verres d’alcool de   enfants en uniformes qui se rendent   montures dans la cour intérieure,
       pomme, les tables et les têtes tournent   au collège.                     avec un petit pincement au cœur.
    un peu, parfois beaucoup, c’est sûrement   Des deux côtés de la route, les      Une visite dans le brouhaha de
 l’altitude !   habitations se succèdent, nichées                                Katmandou s’impose. Le bruit, les
               dans une végétation luxuriante. Des   de 150 mètres, emprunter un chemin   odeurs, les couleurs, il faudrait davantage
 Arrêt dans un village, quatre hommes   Jour 12   murs de torchis aux tôles ondulées,   accidenté pour finalement parvenir à   de temps pour visiter la ville.
 viennent de tuer un Yak qui git sur le   Adieu  Tatopani et en route vers la   des épis de maïs sont suspendus et   une oasis de verdure exotique posée
 dos, ils dépècent l’animal en tirant sur   civilisation. Sur la piste, nous cheminons   sèchent au soleil. Les habitants sont   sur un flanc de colline. Il s’agit sans   L’aventure est terminée, le souvenir
 la peau et en la frappant avec la partie   de  concert  avec  des  troupeaux  de   souriants La route toute en lacets qui   conteste  du  plus  bel  endroit  pour   reste gravé à jamais.   •
 cognée de leur hache pour la détacher.   chèvres et de moutons. Les pièges sont   mène à Bandipur est un bonheur pour   dormir. Les constructions respectent  le

 Deux bus sont restés bloqués en se   toujours aussi nombreux. Une chute   le motard. Arrêt déjeuner dans ce
 croisant  sur  un  passage  étroit,  les   Trois femmes portent sur leurs dos des   arrive, sans trop de mal. Après un   village charmant et isolé qui fait penser
 manœuvres sont difficiles car le bus est   paniers tressés remplis à ras-bord de   dépassement mal maîtrisé, je ne vois   à un comptoir de la route de la soie.
 au bord du précipice. Après plusieurs   blocs de pierre. La charge doit peser au   pas une ornière, je suis projeté contre   Un temple minuscule surplombe une
 moins trois fois leur poids. Maintenue   la voiture que je doublais ce qui a pour
               colline. Il faut le mériter, l’ascension
 par une lanière, chaque panier vient   conséquence de redresser la moto alors   est difficile jusqu’à la pinède qui abrite
 prendre appui sur leur front.   que je me dirigeais directement sous les   le temple mais la vue à 360° compense
 La  descente  est  ardue,  la  fatigue   roues du véhicule, merci Vishnu ! Les   largement cette difficulté.
 accumulée  a  pour  conséquence  de   dégâts sont minimes. Après quelques   Nous redescendons par la même route.
               Tout au long du parcours nous avons
 provoquer une baisse de vigilance et   palabres, 5000 roupies sont remises au
               constaté que la pollution est importante,
 quelques chutes viennent nous rappeler   conducteur en guise de constat amiable.
               la verrue des plastiques accumulés sur
 à l’ordre. L’univers minéral s’estompe   Plus loin, au point de ralliement, des
               le bord des routes est présente, comme
 pour laisser place à la zone boisée. Au   réfugiés tibétains nous vendent de la
               partout dans le monde, peut-être même
 point de ralliement, Pierry se précipite   verroterie.
 vers une maison. Une mère maltraite   Nous passons la nuit dans le magnifique   davantage.
   son petit garçon. Il est à terre et elle   hôtel Begnas lake, adossé à une colline   A propos de pollution, la moto de

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