Page 26 - Rebelle-Santé n° 218
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LA CHRONIQUE
de Pınar Selek
Enfants hyperactifs:
et si on les laissait vivre leur hyper-vitalité ?
Un enseignant spécialisé réagit vis-à-vis des traitements de l’hyperactivité des enfants
Cette fois-ci, nous accueil- lons, dans cette rubrique, un enseignant spécialisé
au sein d’un RASED. Il est «maître G». C’est la dénomina- tion des maîtres spécialisés dans les aides rééducatives au sein de l’éducation nationale ; il se charge plus spécifiquement des problèmes de comportements. Notre maître s’occupe des enfants dont le com- portement, dans la classe, n’est pas compatible avec ce que l’on exige d’un élève pour progresser dans ses apprentissages. Écoutons ses critiques et ses propositions sur le traitement des enfants «qui bougent trop ».
DES CONDITIONS DE TRAVAIL TRÈS DIFFICILES POUR LES ÉDUCATEURS SPÉCIALISÉS
Cet enseignant travaille au sein d’écoles situées dans un large sec- teur. Il est chargé de rééduquer à partir du jeu les enfants qui n’ar- rivent pas à apprendre ou qui ne parviennent pas à avoir une atti- tude compatible avec les appren- tissages. Les techniques utilisées
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s’inspirent en partie de la psy- chanalyse des enfants telle que la pratiquait D.W. Winnicott. Il ne s’agitpasd’untravailpsychothéra- peutique, mais d’un travail scolaire, pour que l’enfant s’autorise à chan- ger son fonctionnement et accepte de le modifier pour re-devenir élève ! Cette aide est gratuite et dis- pensée dans les écoles de France ! Il s’agit souvent de suivis indi- viduels, mais aussi de prises en charge de petits groupes ainsi que de classes entières pour des tra- vaux de prévention. Mais je devrais presque parler au passé ! Car les gouvernements successifs ont sup- primé des milliers de postes. Selon notre Maître G, « ils ont ainsi déna- turé la qualité de notre travail ». Par exemple, il lui est arrivé d’être le seul enseignant spécialisé sur ces problématiques comportementales sur un territoire comptant à peu près 70 000 habitants. « Le ministre actuel a décidé de supprimer notre métier pour le transformer en une sorte de job de conseiller auprès des enseignants. Fini le contact avec les enfants et les familles ! »
« ENTENDONS-NOUS LES CORPS QUI BOUGENT AU FOND DES CLASSES ? »
C’est la réflexion qu’il pose et qui n’est pas anodine. Il a pu constater à maintes reprises que le corps est témoin des émotions. «L’agitation corporelle des enfants en difficulté scolaire, leur manque d’attention, d’intérêt pour les activités, les re- lations avec les pairs et les ensei- gnants... perturbent les classes.» Il faut donc créer des espaces d’expression corporelle : danse, théâtre, mime, yoga, relaxation... dans la classe. Mais surtout, il n’y a plus assez de moyens pour les aides spécifiques aux enfants en difficulté, de solutions qui leur per- mettaient de se libérer d’émotions perturbantes trop fortes.
«Entre 2008 et 2012, 33 % des postes de maîtres spécialisés ont été supprimés en France.» L’aide apportée par ses collègues et lui- même sur son secteur, chaque année, à environ 500 enfants pour mieux vivre leur scolarité, prendre confiance en eux, être en réussite,