Page 65 - VECTEUR MAGAZINE 4 - Décembre 2020
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Alexi  s’adresse  à  la  salle  pleine  en  finnois  pour   Alors quand Alexi le désigne ce soir "Mrs Janne f*in
      remercier les fans de leur soutien et leur fidélité.    Wirman !", il ébauche un faible sourire et déroule

      Sans transition le titre trailer de la tournée, "Under   un  solo  à  tout  casser  avec  naturel  et  fluidité…
                                                             comme  toujours…  facile  !  Mais  à  cet  instant,


      Grass and Clover" et le très mélodique "Platitudes     l’univers bodomien commence à se fissurer et une
      and  Barren  Words"  débutent  logiquement  le         douleur  sourde  commence  à  s’écouler  dans  mes
      concert. Alexi a sa voix des bons jours avec même      veines  et  ne  s’arrêtera  plus  jusqu’à  ce  jour.  Les
      des  modulations  inattendues  et  la  balance  est    décors se succèdent et avec eux toutes les vies de
      parfaite. De très jeunes adorateurs sont tassés au     Bodom.  La  guitare  d’Alexi  pleure  sur  l’intro  de
      premier rang et beaucoup d’entre eux découvrent        "Everytime I Die", cette variante est magnifique et
      Children of Bodom pour la première fois.
                                                             traduit très bien la gravité contenue du public à cet
      Les  sirènes  hurlantes  tiennent  la  salle  en  haleine   instant.
      quand le riff de "In Your Face" vient déchirer la nuit.   Janne fait rire l’assistance qui retrouve son énergie
      La clameur s’élève aussitôt et les lettres dorées de   et scande "Are You Dead Yet" en osmose. Daniel
      COB  tournoient  comme  un  gyrophare  dans  la        Freyberg  ne  montre  aucune  émotion  en  restant
      pénombre  pendant  que  Jaska  démarre  à  fond de     sobre et professionnel, il aura su sans nul doute être
      train,  au  point  qu’Alexi  peine  à  suivre  et  que  le   un  soutien  pour  tous  et  trouver  sa  place  avec
      public lui porte secours en s’écriant "Incoming !".    beaucoup de  tact.  Il  accompagne  parfois  Henkka
      Ouf  !  Pour  ce  dernier  concert  le  son  est       sur les chœurs… Cela aussi ça va me manquer, de
      définitivement bon.
                                                             même que les quelques titres jamais entendus en
      Henkka  Seppälä  ne  sort  pas  de  sa  réserve        live  et  que  je  n’aurai  jamais  plus  l’occasion
      habituelle  et  paraît  même  vivre  ce  moment  pour   d’entendre  en  concert  comme  "Chokehold"  ou
      lui-même, tout entier concentré dans son jeu. Pour     "Mask of Sanity".
      lui, Children, c’est déjà fini et la tristesse se lit sur   Les  phares  allumés,  les  lumières  rouge-sang
      son visage. Cette ultime setlist reprend chacun des    tournoient au-dessus de la scène. "Blooddrunk ! "
      albums, sans surprise et le décorum accompagne         crie  Alexi,  le  riff  de  guitare  déferle  pendant  que
      chaque  époque.  La  belle  américaine  nous  fait  de   Janne sort un instant de sa torpeur et interpelle le
      l’œil quand débute "Bodom Beach Terror" pendant        public.
      qu’un circle pit gentillet se dessine devant la scène.
      On est loin du déferlement d’adrénaline du Hellfest    Tous  les  albums  ne  sont  pas  de  la  même  qualité
      2018  et  pourtant…déjà  alors,  Janne  Wirman         mais  chacun  renferme  sa  petite  pépite  comme  "I
      semblait déambuler sur scène sans conviction.          Worship Chaos", le public averti ne s’y trompe pas
                                                             et  donne  la  réplique,  galvanisé  par  un  clavier
                                                             débridé et ce long cri puissant de Alexi qui donne
                                                             la chair de poule.

                                                             Aux  premières  notes  de  "Angels  Don’t  Kill",  les
                                                             larmes montent brutalement. Chaque titre évoque
                                                             une histoire pour chacun et une histoire commune.
                                                             J’observe les visages, tirés et graves. Pour chacun,
                                                             la ballade à l’envers met la balafre à découvert.

                                                             A  quelques  mètres,    Roope  Latvala  semble
                                                             totalement    absent,   titubant   et   visiblement
                                                             malheureux pendant qu’Alexi massacre le solo et
                                                             m’arrache  un  rire  nerveux.  Les  anges  du  death
                                                             metal sont côte à côte pour une partition à quatre
                                                             mains dont ils ont le secret et mon cœur se brise,
                                                             c’est fini, c’est bien fini.


                                                             Entendu  une  seule  fois  en  concert  au  Download
                                                             2016,  "Follow  the  Reaper"  me  remplit  de  joie  et
                                                             c’est l’occasion rêvée pour une démonstration de
                                                             technique, ici totalement maitrisée. Janne retrouve
                                                             le lien avec le public et Jaska se déchaine derrière
                                                             ses fûts. Puis vient "Deadnight Warrior", le premier
                                                             titre  que  j’ai  écouté  du  groupe  avec  son
  VECTEUR MAGAZINE – NOVEMBRE 2020                                                                                                                                       PAGE 65
                                                             atmosphère  gravée  en  moi  dès  le  premier  jour.
                                                             L’incontournable  "Needled  24/7"  clôt  le  set
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