Page 26 - Correspondance coloniale
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Colonisation de la sexualité

            J’ai aussi complètement influencé votre perception de la nudité.

            J’ai rendu le corps tabou, demandant à toutes les races de se

            couvrir décemment en fonction de mes modes. J’ai qualifié de
            sauvage le fait de marcher pied-nu, comme nous l’avons fait

            pendant des millions d’années. Les chaussures étaient pratiques
            dans le froid, mais elles sont devenues  encore plus pratiques

            pour le commerce. Même si je sais aujourd’hui que marcher en
            contact avec le sol est très bénéfique pour l’organisme


            J’ai réussi à faire croire que le sol était sale, qu’il était important

            que  l’enfant  porte  rapidement  des  chaussures  pour  son  bon
            développement physionomique et qu’il était civilisé de marcher

            les pieds enfermés.


            Sur les territoires colonisés, les autochtones, souvent dans une
            atmosphère chaude étaient peu vêtus. Je fus choqué car moins

            habitué à ce rapport à la nudité, venant de contrées plus froides.
            C’était donc une raison de plus de les voir comme des sauvages,

            exposant  sans  pudeur  leur  corps.  J’ai  même  rendu  les  seins
            profondément érotiques en les cachant. Chez les peuples où les

            femmes  ont  les  seins  dénudés,  les  hommes  ne  sont  pas  en

            permanence en érection, mais je tenais à imposer cette notion de
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